Les événements que nous venons de raconter avaient porté à la prospérité de Nivelles un coup dont elle ne se releva jamais. La population diminua dans une proportion si effrayante, qu'il fallut réduire de cinq le nombre des paroisses ; les richesses de la bourgeoisie furent épuisées pour payer des taxes continuelles ; l'activité industrielle s'éteignit ; l'esprit d'indépendance et de liberté, énervé par le découragement et l'oppression, perdit son ancienne vigueur. Les Nivellois, cependant, continuèrent à lutter contre l'adversité, et leur histoire, pendant les deux derniers siècles, offre encore plus d'une page honorable.
Le prince de Parme donna le gouvernement de la ville à Warnier de Cerf, qui réclama et obtint de la commune une allocation mensuelle de 50 florins. Cette charge était d'autant plus onéreuse pour les bourgeois, qu'ils étaient devenus moins nombreux et appauvris par plus de vingt années de guerres et de troubles. La ville avait si peu de ressources et de crédit qu'elle ne parvenait plus à faire face à ses dépenses. En 1583, afin de payer 550 florins que ses députés avaient accordés au prince de Parme pour l'entretien, pendant 15 jours, de la compagnie du capitaine Mario Mertinego, il fallut taxer les habitants, en leur promettant la restitution de leur cote respective dans les six premiers mois (6 mars 1583). Le maintien d'une garnison était indispensable, car une attaque nouvelle était encore à craindre. C'est dans cette prévision que, le 19 avril 1582, on enjoignit d'enclore de fortes haies et de fossés les jardins et les prés voisins de la ville, afin que les ennemis, c'est-à-dire les partisans des Etats, ne pussent y entrer ni y enlever des bestiaux ; en outre, on ordonna aux bourgeois de faire connaître, chaque jour, le nom de leurs hôtes, et, sous peine de 10 florins, on défendit aux brasseurs, aux cabaretiers, aux revendeurs, de continuer à débiter après neuf heures du soir. Le 27 mai de l'année suivante, des troupes ennemies se présentèrent encore devant la ville; la garnison ayant montré beaucoup de résolution pour se défendre, les trois membres lui votèrent immédiatement une allocation extraordinaire de 40 livres de poudre. La sécurité ne renaquit à Nivelles qu'après la soumission de Bruxelles à l'autorité royale, au commencement de l'année 1585.
Les habitants et la garnison, souvent à bout d'expédients, ne se gênaient pas pour abattre des maisons abandonnées, des arbres, des haies, usage qui donna lieu à une ordonnance de l’abbesse et du magistrat, du 16 janvier 1581, et qui fut de nouveau prohibé, le 15 février 1582 par les soins du gouverneur de Cerf. Le chapitre était alors dans un véritable état de gêne. Le 3 novembre 1580, ce corps résolut d'engager à Jean de la Vigne, orfèvre de Mons, pour une somme de 600 florins, les joyaux de la fabrique de Sainte-Gertrude, consistant en: un bassin d'argent du poids de 4 marcs 4 onces 7 esterlings ; un autre bassin semblable, ayant la sainte au mitan (c'est-à-dire au milieu) et bordé d'or, du poids de 3 marcs 5 onces 15 esterlings ; un haut gobelet, avec couvercle doré, pesant 4 marcs 12 onces 12 1/2 esterlings ; deux coupes dorées, du poids de 5 marcs 5 onces 7 1/2 esterlings ; une troisième coupe dorée, ornée de trois lions, du poids de 3 marcs 5 esterlings, et une quatrième, garnie d'argent et du poids de 2 marcs 2 1/2 onces. Tous ces joyaux ne furent évalués qu'à 43 patars l'once, parce qu'ils n'étaient faits que d'argent d'Allemagne. Le 8 juin 1582, en considération de la misère générale, le chapitre résolut de supprimer provisoirement une partie du personnel attaché à la collégiale. Les vicaires, les chantres, les organistes furent congédiés, et on décida que deux plantiniers, pris parmi les chanoines, célébreraient la messe pour les chanoinesses et feraient aux vêpres l'office de psautiers. Enfin, le chapitre décida, le 11 octobre 1585, qu'une requête serait adressée au prince de Parme, afin d'obtenir l'autorisation d'aliéner des biens jusqu'à concurrence de 40,000 florins, et notamment Brûhl et Walem, en Allemagne, et Villers Sainte-Gertrude et Tenneville, en Ardenne. L'abbesse avait, dès le 4 juillet 1584, consenti à cette aliénation, que l'on ajourna ensuite jusqu'à son retour à Nivelles, retour qui eut lieu le 16 août 1585 ; on en reprit le projet en 1587, mais sans y donner suite.
Le corps de sainte Gertrude avait été transporté hors de Nivelles en 1576 ou 1577 ; on le ramena de Mons le 12 août 1585. Des bourgeois armés, au nombre de 200, allèrent à sa rencontre. Au moment où le cortège arriva à une demi-lieue des remparts, les cloches sonnèrent à toute volée ; aux portes de la ville, il trouva les membres du chapitre, les frères mineurs, les Guillemins, tous la torche à la main. Le 17 septembre, les reliques vénérées de la patronne de Nivelles furent replacées dans l'église, et, la même année, à la dédicace ou fête locale, le jour de la Saint-Michel, on célébra par de grandes réjouissances leur retour triomphal. Depuis, les événements militaires n'eurent plus qu'un faible retentissement à Nivelles. Le 25 octobre 1587, par suite d'une alerte, on ordonna que, chaque jour, une demi-compagnie de bourgeois monterait la garde. Vers cette époque, un soldat originaire de Nivelles, nommé Pierre Dufour, fut arrêté à Lille et avoua qu'il avait accepté la dangereuse et honteuse mission d'assassiner le comte Maurice de Nassau, le successeur de son père, Guillaume le Taciturne, dans le gouvernement des provinces-unies des Pays-Bas, soulevées contre l'Espagne.
En 1594, lorsque l'archiduc Ernest vint prendre possession du gouvernement des Pays-Bas espagnols, la ville acheta, pour les lui offrir, trois aimes de vin blanc et un poinçon de vin rouge, mais ce prince ne passa pas par Nivelles.
Les magistrats de la commune ayant, selon l'usage, compris les chanoines au nombre des personnes qui avaient à loger des gens de guerre, il intervint un ordre du comte de Fuentes, en date du 18 décembre 1595, qui confirmait aux chanoines leur prétendue exemption de cette charge. Comme le firent remarquer les magistrats, un privilège de ce genre, basé sur des motifs faciles à comprendre, n'avait jadis été accordé qu'à l'abbesse et aux chanoinesses ; l'étendre davantage, l'étendre aux personnes habitant les plus belles maisons de la ville, c'était aggraver outre mesure la situation des bourgeois. Une apostille du 10 janvier 1596 accueillit les plaintes de ceux-ci, et déclara subreptice l'ordre mentionné plus haut, sans toutefois mettre fin à la contestation.
Le 9 février 1596, à 3 heures après midi, arriva à Nivelles, venant d'Espagne, l'archiduc et cardinal Albert d'Autriche, chargé de succéder à Ernest. Il était à cheval et entièrement vêtu de rouge ; devant lui marchaient le comte de Fuenttes et le prince d'Orange (Guillaume, jadis appelé le comte de Bueren, qui était âgé de 37 ans) ; derrière Albert se tenaient le comte de Solre et quelques autres seigneurs. Le maire, les échevins, les rentiers, les jurés, les maîtres des métiers, tous ayant des haches ou torches en main, attendaient le cortège hors de la porte de Beliane, au pont près du moulin. A l'approche de l'archiduc, le pensionnaire dit en latin en s'agenouillant : « Sérénissime prince », mais Albert le fit relever, et ce fut debout qu'il continua sa harangue de bienvenue. Quand elle fut terminée, les maîtres des métiers prirent les devants, et les magistrats se rangèrent aux côtés de l'archiduc. A la porte, à l'intérieur, on trouva le clergé séculier, les religieux de tous les ordres, le chapitre, et, lorsqu'on parvint à la maison de l'abbesse, l'official prit la parole au nom de ce dernier Corps. La garnison qui se composait de sept compagnies espagnoles du terce de don Louis de Velasco, était rangée sur le marché et tira des salves en l'honneur de l'archiduc. Le soir, on alluma dans les rues des tonneaux de pecq (ou de goudron) et des flambeaux, et deux grands feux, un près de la Fontaine à l'Aigle et un près du perron de l'hôtel-de-ville. Au soir, les rentiers et le pensionnaire se rendirent au palais de l'abbesse, où ils remirent au maître d'hôtel d'Albert, comme cadeau pour ce prince, un poinçon de vin de France et un poinçon de vin du Rhin.
Nivelles se trouvant sur la route directe de Bruxelles à Binche, reçut souvent la visite d'Albert. En 1598, il y vint à plusieurs reprises. Le 16 juillet, la ville lui présenta 12 cannes de vin, moitié vin rouge, à 33 sous la gelte, et moitié vin blanc, à 2 livres. Sept cannes furent données aux personnes de sa suite: le duc d'Aumale, le prince d'Orange, le comte d'Egmont, M. de Chassey etc., qui dinèrent, ce jour là, chez M. de Bassigny (alors seigneur de Neuve-Rue par alliance), et autant au colonel la Bourlotte, à M. de Moriensart et autres, qui banquetèrent au logis du colonel Paton.
Après que l'archiduc, en partant pour l'Espagne, où il devait épouser l'infante Isabelle, eut déposé à Hal son habit de cardinal, il se rendit à Binche par Nivelles, où on le salua pour la première fois du titre de duc de Brabant. A cette occasion, la ville distribua: a l'huissier de sa chambre, 2 livres ; à ses cinquante hallebardiers, 15 l. ; à ses archers, 23 l. 13 sous ; à ses quatre trompettes, 3 l. 6 s. ; à ses fourriers, 10 l. 8 s. ; à ses laquais, 9 l. 18 s. ; aux gens (ou domestiques) de M. de Moriensart, 7 l. 12 s. ; aux tamboureurs de l'archiduc, 33 l. ; aux trois compagnies bourgeoises qui avaient été à la rencontre de ce prince, 36 l.
Le 30 août 1599, Albert et Isabelle, venant d'Espagne, partirent de Namur, dinèrent à Fleurus, et arrivèrent à 8 heures du soir à la chapelle Al Saulx, où se trouvaient les rentiers, les jurés, le maire, les échevins et les maîtres des métiers. Le pensionnaire harangua les nouveaux souverains des Pays-Bas et leur offrit les clés de la ville ; Albert lui rendit les clés et répondit assez longuement à sa harangue Quand il eut fini, le pensionnaire s'écria: « Vivent ses Altezes », puis on se remit en marche. La ville était illuminée et ornée de mais ; trois compagnies de bourgeois et une de jeunes gens occupaient les places publiques et tiraient des salves d'honneur. Trois « théâtres de rhétorique », suivant l'usage du temps, avaient été élevés : le premier, au coin de la Maison de Villers (ou refuge de l'abbaye de ce nom), « où étoit Vérité », c'est-à-dire une représentation allégorique de cette vertu ; le deuxième, contre la Maison des Corduaniers (ou Cordonniers), vis-à-vis la rue de Saulx, « où Justice mettoit a guerre à bout », et le troisième, près la « Grande maison, pour louange de la bienvenue ». L'hôtel-de-ville était décoré de trois draperies aux couleurs de l'infante : rouge, bleu et blanc, et offrant les armoiries des archiducs, placées entre celles du Brabant et celles de Nivelles. A la porte de la collégiale était rangé le chapitre, qui offrit aux archiducs l'Evangile à baiser ; Albert et Isabelle descendirent de leur coche et se mirent à genoux pour accomplir cet acte de piété. Apres le souper, qui se donna au palais abbatial, les rentiers et le pensionnaire offrirent les cadeaux de la ville: trois pièces de fine batiste (du prix de 168 livres d'Artois), trois pièces de « couvrechieffs » (valant 94 l), un poinçon de vin rouge (valant 64 l.) et un poinçon de vin du Rhin (valant 72 l.). Une grande quantité de vin, en cannes, fut offerte aux gentilshommes de la suite des archiducs. Les courtaux et mulets qui les accompagnaient, au nombre de 500 à 600, logèrent dans les faubourgs, entre lesquels ils furent répartis par les soins des rentiers.
Les archiducs trouvèrent à Nivelles les Etats de Brabant, qui les complimentèrent par l'organe de leur pensionnaire, Philippe Macs, et les assurèrent de leur soumission. Le lendemain, ils partirent pour Hal, escortés par six compagnies bourgeoises et une compagnie de jeunes gens. Ces compagnies reçurent de la ville 10 livres d'Artois chacune, en récompense du service qu'elles avaient fait à l'occasion de la réception des archiducs (résolution en date du 15 octobre). Après leur premier voyage dans leurs Etats, ces princes passèrent de nouveau à Nivelles, le 27 février 1600, se rendant de Binche à Bruxelles.
Les finances communales sortaient difficilement de leur état de pénurie. Un octroi accordé à la ville, en 1593, porte à plus de 50,000 florins la somme qu'elle avait dépensée pour reconstruire une grande partie des fortifications et satisfaire à d'autres obligations impérieuses. Se voyant pressée de rembourser la rente de 387 livres 10 sous d'Artois, que les trois membres, sous leur responsabilité personnelle, avaient levée pour éviter un saccagement, en 1580, elle aliéna un communal, qui avait été engagé à Louis de Malihan pour un terme de 100 ans et moyennant 20 florins par an ; une moitié de ce bien avait été confisquée sur le fils de Malihan, mais le domaine renonça à ses droits en faveur de Nivelles (lettres patentes du 15 octobre 1591). La ville parvint, à cette époque, à faire valoir ses prétentions sur le chapitre, pour la part de ce corps dans le payement de la rançon de la ville. Cette dernière, après l'arrivée des archiducs, se trouva chargée de 300 florins par mois, pour sa part dans l'aide de 18,000 florins votée par les Etats de Brabant, et de l'entretien de 200 chevaux et courtaux, entretien qui coûtait mensuellement 630 florins. Pour lui faciliter les moyens de faire face à ces dépenses, un octroi du 18 novembre 1599) réduisit de 300 à 200 florins par mois la cote de Nivelles dans l'aide, et l'autorisa à vendre quelques héritages communaux et cens, à la condition de payer au domaine 4 patars par bonnier vendu.
Une partie des troupes s'étant soulevée et les trois membres ayant été avertis par M. de Bassigny qu'il était urgent de se précautionner contre ces « amutinés », deux personnes furent chargées d'aller s'informer du lieu où ils se trouvaient ; on invita les habitants des faubourgs à se retirer à l'intérieur des murs et les bourgeois à s'armer ; on résolut d'acheter 100 piques et 500 livres de poudre, et on établit des gardes de nuit (23 février 1600). Les désordres continuant, le chapitre ordonna le transport à Mons de ses archives et de celles de l'hôpital (11 juillet 1602), qui furent réclamées au bout de deux mois (résolution du 10 septembre ; Des craintes semblables renaquirent, en 1604. A l'approche des ennemis joints aux soldats mutinés, 574 paysans entrèrent, le 30 avril, en ville, où ils restèrent jusqu'au 7 mai. Le seigneur de Bornival, François d'Arlin, qui avait été désigné pour commander à Nivelles, leur fit distribuer du pain pour 138 livres (outre 26 l. 6 sous de frais de cuisage), du fromage pour 37 l., du fromage de Flandre pour 41 l. 10 s., 20 1/2 tonneaux de cervoise ou bière pour 117 l. 10 s., 12 tonneaux de petite cervoise pour 10 l. 16 s. Leurs officiers furent gratifiés de 6 geltes de vin, qui coutèrent 7 l. 16 s. Le 5 mai, on donna aux soldats du capitaine Vilancquet, qui arrivèrent la nuit, deux tonneaux de bière valant 10 1. et 100 œufs (valant 28 s.). Le 8, les paysans furent rappelés et revinrent au nombre de 100 environ. Ces deux alertes coûtèrent 1,827 livres 14 sous 3 deniers, que les archiducs payèrent, sauf 24 l. 19 s. 3 d., ainsi qu'il résulte d'un compte arrêté par les rentiers, le 21 juillet 1604, en présence de M. de Bornival.
Le 22 juin, sur la représentation de ce seigneur, on résolut de nouveau de faire garder la ville. François d'Arlin montra aux trois membres des lettres du marquis d'Havré qui enjoignaient à la commune de le reconnaître pour gouverneur. Le 25 il déclara avoir reçu mission de lever 100 hommes, qui recevraient un philippus par mois aussi longtemps qu'ils resteraient chez eux et 4 philippus quand on les appellerait aux armes. De l'avis de la commune, il choisit pour lieutenant Lancelot de Dave. Mais le danger ne parut pas longtemps redoutable, car, dès le 28 juin, le chapitre fit revenir de Mons ses archives. Peu de temps après, l'abbesse de Hennin fit son entrée (le 31 août). Elle était à peine installée que M. de Bornival annonçait l'invasion du pays par 2,500 ennemis (10 septembre), et que 18 compagnies espagnoles, sous les ordres du sergent-major don Luis de Beaumont et de Navarre, entraient dans la ville, dont les habitants se montrèrent fort mécontents de ce surcroit de charges.
En 1605, la peste ravagea Ophain, Bois-Seigneur-Isaac et les villages suivants, dont la population reçut une défense formelle de venir à Nivelles (11 août), défense qui fut ensuite étendue aux habitants de toutes les localités infectées, sous peine de 50 florins pour les contrevenants. Des gardes, placés aux portes del Vaulx, de Bruxelles et Beliane, durent assurer l'exécution de cet ordre. Néanmoins, la contagion pénétra en ville, où, le 2 novembre suivant, le prêtre Adrien Dufour fut désigné pour entendre la confession des personnes qui étaient atteintes de la peste.
Le 7 août 1607, le nonce apostolique Benlivoglio, qui arrivait d'Italie, entra dans Nivelles à 7 heures du soir. Les cordeliers et les chanoines, avec la croix et les gonfanons, allèrent le recevoir à la porte de Namur ou Beliane ; l'abbesse et les chanoinesses l'attendaient au grand portail de la collégiale et le conduisirent au chœur, où on entonna le Te Deum, et de là, à l'hôtel abbatial, où le nonce logea et où la ville lui offrit trois cannes de vin blanc et de vin rouge.
Le 5 mai 1609 on publia la trêve de douze ans, conclue avec les Provinces-Unies, à la grande joie des habitants. Par ordre des trois membres, on alluma trois grands feux sur les marchés. Les rentiers, échevins et jurés se rendirent en corps à la collégiale, où la grosse cloche sonna pendant une heure, de 11 heures à midi, tandis que le chapitre chantait le Te Deum.
Plusieurs événements fâcheux avaient récemment attristé la ville. Le seigneur de Romeries, Pierre-Philippe de la Viesville, avait failli tuer, à une des portes, l'avocat Désiré Malcotte, mais on était parvenu à détourner le coup. Le bailli du Brabant wallon fit procéder contre Viesville, dont l'emprisonnement à Mons fut ordonné par les archiducs. Par bonheur pour lui, quelques personnes de marque intervinrent en sa faveur et, après s'être accordé avec la partie adverse, il obtint sa grâce au prix d'une somme de 150 livres (1606-1611). Le maire de La Hulpe, François de Herissem, fut également blessé par des soldats espagnols du régiment de don Luigo de Borelia (1607-1611).
Quoique la ville restât obérée, quoique la bourgeoisie continuât à se plaindre des charges qui pesaient sur elle, Nivelles reprit quelque vie. Le premier quart du XVIe siècle y vit naître plusieurs institutions, nouvelles: le séminaire épiscopal, les couvents des Jésuites et des Annonciades. On essaya aussi de faire refleurir le commerce. Les fermiers du tonlieu d'Anvers, par eau, ayant voulu prélever ce droit à charge de Nivellois, le pensionnaire fut envoyé à Anvers pour prendre des informations à ce sujet et, comme la prétention des fermiers était nouvelle, la commune résolut de présenter requête au conseil de Brabant à l'effet d'être maintenue dans ses franchises (4 novembre 1613). De grandes faveurs furent accordées à deux « maîtres faiseurs de drap », qui désiraient s'établir en ville. Les trois membres leur votèrent à chacun une allocation annuelle de 40 florins, l'entrée gratuite dans la bourgeoisie et le métier, une franchise entière de guet, de garde, de logements militaires et du paiement de la maltôte ou assise de bière. Ces fabricants furent autorisés à vendre en détail, mais seulement pendant un an, afin qu'on pût le leur interdire si cela présentait des inconvénients ; ils devaient payer la maltôte de la laine pour toutes les étoffes vendues en détail, et enseigner leur industrie à deux pauvres ouvriers, qui, après avoir habité trois ans avec eux, seraient tenus d'en instruire d'autres à leur tour (28 juin 1614).
Une maladie contagieuse sévit à Mons, au mois de juillet 1615. Les échevins ayant, à cette occasion, interdit l'entrée à toute personne venant de cette ville, les rentiers et les jurés, de concert avec les maîtres des métiers, décidèrent qu'ils plaideraient contre cette usurpation de pouvoirs, et qu'ils provoqueraient l'annulation «des ordonnances faictes contre la république » (13 août). Deux sœurs grises étant mortes de la contagion, la commune fit fermer leur couvent et enjoignit aux rentiers de fournir le nécessaire à la communauté (1er août 1616). Une sœur du même ordre, mais du couvent de Hal, nommée Barbe, se chargea de soigner les malades, moyennant 18 florins par mois, outre son entretien, que la ville prit à sa charge, ainsi que la distribution gratuite des médicaments aux pauvres (15 septembre 1616). Le 19 décembre suivant, la peste s'était rallumée au faubourg de Mons, et en 1617 elle n'avait pas cessé ses ravages.
Le mardi 25 janvier 1617, vers trois heures après-midi, arriva l'évêque de Namur, Jean Dauvin. Les magistrats et les compagnies bourgeoises allèrent le recevoir hors la porte del Saulx et le conduisirent au marché. Là, le cortège fit halte et les bourgeois formèrent une double haie, au milieu de laquelle l'évêque passa pour se rendre à son hôtel. Le lendemain, le clergé vint le chercher et le conduisit à la collégiale, où les chanoinesses l'attendaient au portail.
En 1619, eut lieu la réception des restes de quelques-uns des martyrs de Gorcum, restes qui furent déposés au couvent des Récollets. En 1622 se donna la sanglante bataille de Mellet ou Fleurus, à la suite de laquelle un grand nombre de blessés furent transportés à Nivelles ; on les plaça à la grande école, où les commissaires de l'hôpital royal et les pères jésuites allèrent les visiter ; cette année, le corps de sainte-Gertrude fut ôté de la châsse et transporté à Bruxelles, le 28 août, veille de la bataille, et ramené à Nivelles le 25 novembre suivant. En 1023, la peste désolant Marbais et d'autres villages vers Namur, ordre fut donné aux capitaines de la bourgeoisie de fournir à tour de rôle huit hommes, qui ne laisseraient entrer en ville que des personnes connues ou munies de certificats de santé (9 septembre).
En 1624, le 9 octobre, entra en ville le prince de Pologne, accompagné des ducs de Croy et d'Aerschot. Bientôt éclata dans les campagnes voisines de Nivelles une nouvelle maladie contagieuse, contre laquelle on essaya de se précautionner, le 18 août 1625 et le 28 mai 1627. Ce fut alors que pour pouvoir placer à l'écart les infectés, dont le nombre augmentait sans cesse, la ville fit bâtir des huttes hors la porte de Mons, sur un terrain qui avait été cédé pour cet objet par le chapitre (résolution des trois membres, du 28 juin 1627). Au 28 juillet 1628, le fléau n'avait pas cessé.
En 1632, la guerre recommença entre la France et l'Espagne. Dans la prévision d'une attaque de l'armée ennemie du côté de la Thiérache, on ordonna, à la bourgeoisie de fournir tous les jours une demi-compagnie pour la garde des remparts, et on plaça une vigie au sommet de la tour de la collégiale (17 août). A la demande du grand bailli, des députés de la ville se rendirent au mois de novembre à Bruxelles, afin d'y participera un arrangement au sujet de la contribution à payer à la France pour éviter des dévastations. Nivelles consentit à payer par semestre 900 florins, dont la ville fournirait les deux tiers, et le chapitre le tiers restant. Mais cette fois Nivelles ne courut aucun danger, non plus qu’en 1633, lors de l'arrivée autour de Maestricht d'une puissante armée hollandaise, renforcée d'un corps nombreux de cavalerie suédoise ; ni en 1635, quand les Français et les Hollandais coalisés saccagèrent Tirlemont et assiégèrent vainement Louvain. Le 21 juin 1635, ordre fut donné aux habitants de se trouver à deux heures après midi, au grand marché, nantis de munitions de guerre et, autant que possible, d'armes, et tous : bourgeois et serviteurs, grands et petits, laïques et ecclésiastiques, sans exception, durent aller aider à obstruer les portes de Namur, de Chaude-Rue et de Sainte-Anne. Le lendemain, le seigneur de Bornival accepta le commandement de la ville, à la demande des trois membres, qui lui votèrent une allocation de 100 florins. Le corps de sainte Gertrude ne fut remis dans la châsse que le 20 septembre, après qu'il eut été caché dans l'église même pendant trois mois.
Plus encore que la guerre, la peste frappait nos contrées sans relâche. De 1632 à 1636, elle fit à Nivelles d'affreux ravages. Elle se déclara chez Pierre Senet, à la suite de l'arrivée de vieilles hardes qui, dit-on, venaient de Malines ; le 28 novembre 1632, parut une défense aux fripiers de fréquenter le marché de Bruxelles. Le mal allant en croissant, on prescrivit de faire sortir de la ville les porcs, les chèvres, les lapins, les canards, les oisons etc. Quelques bourgeois malades s'étant retirés aux Huttes, Nicolas Wouthier, de l'auberge le Monde, hors la porte de Mons, fut nommé leur pourvoyeur, parce que sa demeure communiquait avec les Huttes au moyen de chemins très écartés (20 juin 1633). Le 25 juillet suivant eut lieu une procession solennelle, dans laquelle le corps saint, c'est-à-dire le cercueil de sainte Gertrude, fut porté par les chanoines. Le 4 août, on fit venir de Namur un médecin qui s'était fait une réputation pour ces cas spéciaux, Nicolas Saint-Roch, à qui la ville alloua un traitement mensuel de 53 florins. Le 12 mai 1634, le chapitre décida que ses membres et ses suppôts qui mourraient de la contagion seraient enterrés dans la vieille grotte, c'est-à-dire dans la crypte de la collégiale, et les serviteurs des deux sexes de ce corps, au cimetière Notre-Dame. Des ordonnances des 7 septembre 1635, 16 mai, 16 et 23 juin 1636 nous apprennent que la contagion ne cessait pas. Le 21 octobre 1636, un membre du chapitre en mourut et fut enseveli de nuit, dans l'église. Cette fois, quatre ou cinq chanoines et chanoinesses avaient été frappés mortellement par la peste.
Le 18 août 1637, le corps saint partit de nouveau pour Bruxelles, d'où il ne revint que le 14 novembre. Le 20 septembre 1641, par suite de la crainte qu'inspiraient les courses des Hollandais, l'abbesse ne consentit pas à ce que le chapitre accordât le corps saint aux magistrats, pour la procession de la Saint-Michel. En 1643, les Français s'avancèrent jusqu'à Binche. Le gouvernement espagnol envoya 700 soldats espagnols renforcer la garnison de Nivelles, où on les logea chez les habitants, sans exception, et où il se trouvait déjà des soldats wallons du terce de Ribaucourt. Le lendemain de leur arrivée, 1er juin, les ennemis se montrèrent aux environs des « Trois Tillieux, près de « Couparty, deseure la Closière de Clarice ». Ils se répandirent dans les campagnes, ravagèrent les habitations et s'emparèrent d'une quantité de bestiaux et de quelques personnes. Gassion, qui les commandait, fit sommer la ville de se rendre, mais on lui répondit qu'il y avait une bonne garnison bien résolue de maintenir la place, avec l'aide de la bourgeoisie. La ville avait fait conduire sur les remparts quatre vieilles pièces de fer ; quelques coups de canon et des sorties déterminèrent à la retraite les assaillants. Le même jour, le lieutenant maître de camp général, Quevedo, vint visiter les fortifications, dont on accrut la force. La chambre des comptes accorda douze chariots de bois pour ces travaux, qui furent repris sous la direction de Jean Le Roy, sergent-major ou commandant de la bourgeoisie (21 août). On construisit alors, en avant de la Tour dite des Cordeliers, une demi-lune, qui, à la demande des sœurs grises, fut démolie deux ans après, comme étant de peu d'utilité. Le corps saint avait été envoyé au mois de juin à Bruxelles, escorté de 15 à 16 bourgeois armés ; les rentiers ayant offert de l'envoyer chercher dans cette ville, aux frais de la commune et sous bonne garde, le chapitre le leur accorda pour la grande procession (5 septembre). En récompense des preuves de dévouement qu'elle avait données, la ville fut, le 15 août, exemptée de garnison pour un terme de six ans commençant le 1er novembre, moyennant le paiement d'une somme de 9,000 florins.
Le 18 mai 1614, le corps saint fut caché, dans la prévision de nouveaux dangers. Le 7 janvier 1646, la ville pria le chapitre de choisir des députés qui, de concert avec les siens, essaieraient de prévenir l'envoi d'une garnison ; mais ce corps, toujours plus préoccupé de ses prérogatives que dévoué à la cause publique, se borna à répondre que cela ne le regardait pas. Dans les circonstances extrêmes où se trouvait le pays, les États de Brabant, faisant acte de vigueur, comprirent le chapitre dans la capitation qu'ils votèrent, mais, cependant, « pour cette fois seulement et sans tirer à conséquence». L'abbesse fut taxée à 1,000 florins, la prévôté et le prévôt à 90 fl. chacun, le doyen à 30 fl., chaque prébende à 20 fl. etc., le tout payable dans les huit jours (13 août). Vainement les réclamations surgirent : l'abbesse, entre autres, se plaignit sans succès que son bénéfice ne valait pas 10 ou 12,000 florins, mais seulement 3 à 4,000, et que, depuis l'année précédente, les campagnes environnant Nivelles étaient ruinées par les Lorrains qui y étaient cantonnés.
L'année 1647 fut marquée par des événements déplorables: une émeute terrible fut provoquée par les maîtres mulquiniers ou fabricants de fil et par leurs ouvriers. Pour interdire le retour de désordres semblables, les trois membres ordonnèrent le départ dans les vingt-quatre heures de tous les ouvriers mulquiniers non natifs de Nivelles ou n'y ayant pas résidé depuis l'année 1637 inclusivement, et défendirent de les héberger dorénavant, sous peine d'une amende de 100 florins ou d'un bannissement à perpétuité l’ordonnance du 25 septembre). Ces événements eurent de fâcheux résultats pour Nivelles : un grand nombre d'artisans quittèrent cette ville pour se rendre à Cambrai, à Valenciennes etc., où ils portèrent l'art de fabriquer la batiste, art qui y est resté florissant. On essaya inutilement quelques palliatifs : on défendit aux mulquiniers d'acheter du fil fin sinon pour le mettre en œuvre ou le faire mettre en œuvre dans la juridiction de Nivelés, sous peine de 20 florins d'amende et de la confiscation des fils (ordonnance du 10 lévrier 1653). Le coup était porté ; il causa un tort irréparable.
Est-ce par suite de cette sédition funeste qu'on cacha le corps saint, qui fut replacé le 8 août, ou est-ce à cause des désordres des troupes, désordres qui devenaient excessifs? Le 17 septembre, le magistrat ordonna au sergent-major d'aller, avec 2 officiers et 80 bourgeois volontaires, arrêter des déserteurs à la taverne dite Bellâtre, et à celle dite Crèvecœur, sur Monstreux ; il devait les conduire en prison, à tout prix, avec recommandation, toutefois, de n'employer les armes qu'à la dernière extrémité.
Le 5 juin 1648, la conclusion du traité de Munster, entre l'Espagne et les Provinces-Unies, fut célébrée avec enthousiasme. Le pensionnaire donna lecture de ce traité, sur un beau théâtre qu'on éleva en avant de la maison de ville. Un Te Deum fut chanté à la collégiale et les cloches des églises et des couvents sonnèrent à toute volée. Le soir, les rues étincelèrent des feux que projetaient au loin des tonneaux remplis de peck et de fagots, et les chandelles placées sur les façades des maisons.
Par malheur, la guerre continuait avec la France et prolongeait les souffrances de nos populations. En 1649, les habitants reçurent ordre de se pourvoir d'armes et de travailler aux fortifications (27 et 29 août). Le 22 juin 1652, on signifia à tous les pauvres étrangers, qui étaient venus s'établir en ville sans autorisation, qu'ils eussent à partir dans les trois jours. En 1651, les Français s'étant de nouveau avancés jusqu'à Binche, on ordonna à tous les habitants de travailler aux fortifications (14 septembre). L'abbesse et les chanoinesses s'enfuirent à Bruxelles, où elles conduisirent le corps saint, que quelques chanoines et la jeunesse armée allèrent rechercher, le 26 septembre. Le ministre Fuensaldagna avait envoyé à Nivelles, dès le 10, le sergent-major Pelousez et un petit corps de troupes, qui fut renforcé, le 13, par 300 fantassins et 100 cavaliers. En 1655, la ville se vit de nouveau exposée à un siège. Dans cette prévision, le chapitre envoya le corps saint à Bruxelles, chez la veuve De Coninck, et chargea ceux de ses membres qui resteraient à Nivelles de s'arranger pour le mieux, « s'il arrivoit quelque foule à la prise de la ville» (2 août). Ces craintes ne se réalisèrent pas ; le corps saint revint le 24 du mois suivant, et le chapitre alla à sa rencontre jusqu'à la porte de la cité. Par résolution du 2 novembre 1658, le corps saint partit de nouveau ; il fut transporté à Namur, avec l'orfèvrerie et les archives de la collégiale, chez le vicomte Desclez, et ne revint que le 10 août 1659, escorté par six hommes de chaque serment. La peste continuait à joindre ses ravages à ceux de la guerre. Ils provoquèrent, le 25 mars 1651, une défense détenir des porcs. En 1652, la contagion fit de nombreuses victimes à Soignies, Braine-l’Alleu etc. ; on défendit alors, sous peine de 50 florins d'amende, de loger les personnes venant de ces localités et on interdit aux bourgeois d'y passer ou de recevoir des charretiers qui y auraient passé (ordonnance du 2 juillet). Le 22 juin 1655, le chapitre résolut de faire chanter une messe pour que Nivelles fût préservée du même fléau.
Les autres événements que nous avons à signaler sont peu importants.
Le 16 décembre 1651, on offrit aux drapiers qui voudraient s'établir en ville de les admettre librement dans la bourgeoisie, à la seule condition de se faire recevoir dans le métier ; les trois premiers auraient le droit de faire brasser sans payer de maltôte, et seraient exempts du guet, de la garde et des logements militaires.
Le 21 août 1654 eut lieu l'entrée de la reine Christine de Suède. Cette illustre princesse vint de Bruxelles, accompagnée des comtesses de Rennebergh et de Grimberghe, de madame Pimentelli, et d'un grand nombre de cavaliers. Après avoir dîné à Bornival, elle entra dans Nivelles par la porte de Chaude-Rue, où se trouvait la bourgeoisie en armes. Elle fut reçue à l'entrée de l'église par l'abbesse et le chapitre, et le magistrat lui présenta à l'hôtel abbatial les compliments et les cadeaux d'usage.
Au mois de septembre 1655, l'évêque de Namur, Jean de Wachtendonck, vint à Nivelles pour la première fois. Ce prélat n'était pas très pressé de visiter cette partie de son diocèse, mais il s'y décida, à la suite d'une lettre en date du 22 juin de cette année, dans laquelle le magistrat lui déclara que le peuple attendait son arrivée avec une vive impatience, et que « s'il y avoit eu une faute commise à la dernière élection de l'abbesse», cela n'avait été que l'œuvre de quelques particuliers. L'évêque ayant annoncé sa venue pour le 3 septembre, les rentiers et d'autres chefs de la commune allèrent au devant de lui, accompagnés des bourgeois et de la jeunesse en armes ; mais on ne le rencontra pas, parce qu'il avait pris un chemin différent. Un incident fâcheux attrista cette journée. Le maître des ouvrages, Jean de Moitemont, fut tué, près des Conceptionistes, d'un coup de canon tiré pour la solennité.
Le 19 mai 1662, un Te Deum fut chanté à la collégiale, à l'occasion de la déclaration solennelle par laquelle le clerge avait adhéré au dogme de l'Immaculée Conception.
Depuis quelques années on se plaignait que les dépenses de la ville ne fussent pas en rapport avec ses ressources ; les magistrats communaux eux-mêmes reconnurent cette vérité et, par ordonnance du 11 septembre 1653, introduisirent de grandes économies dans leur gestion financière ; mais, soit que les réformes n'eussent pas paru suffisantes ou été suivies d'exécution, quelques «zéleux», se plaignirent de l'élévation excessive des impôts et du favoritisme qui présidait à la nomination aux emplois. Leurs réclamations provoquèrent une réunion générale des trois membres, où on mit en délibération les moyens de soulager la bourgeoisie, et où on résolut de demander un avis par écrit à chacun d'entre eux (20 novembre 1662). D'après l'exposé qui leur fut soumis, il était dû, en arrérages, 6,000 florins, outre 15,000 florins dus aux états de Brabant pour la cote de la ville dans les aides et subsides, et dont le receveur des États pressait le recouvrement au moyen d'exécutions judiciaires à charge de la commune ou des bourgeois notable? ; de plus, les tours, les remparts etc., tombaient en ruine, et, pour subvenir à toutes ces dépendes, on ne pouvait compter, en moyenne, que sur une recette de 10,000 florins. L'opinion de la majorité fut d'emprunter immédiatement 3,000 florins, afin qu'on pût contenter les États, mais les métiers insistèrent pour que les rentiers rendissent d'abord les comptes qui étaient encore en souffrance. Comme on ne parvint pas à s'entendre, l'affaire fut renvoyée au conseiller de Brabant Cuyerman, commissaire du gouvernement pour le renouvellement des magistrats de Nivelles, et à l'officier fiscal, avec prière de décider que, si une exécution judiciaire frappait les habitants, on la fît retomber sur ceux qui n'avaient pas accueilli le projet d'emprunt (résolution du 1er décembre). Ces contestations décidèrent le gouvernement à modifier l'organisation municipale de Nivelles, par un règlement qui porte la date du 1er février 1603.
Le nombre des jurés, qui avait été réduit à huit, fut fixé à neuf, et on supprima les fonctions de rentier. Au lieu des rentiers, qui avaient la gestion des finances communales, on créa un emploi de receveur, dont le titulaire jouirait d'un traitement annuel de 300 florins, serait nommé par le gouvernement, à chaque renouvellement du magistrat, parmi trois candidats présentés par les trois premiers jurés, et devrait être bourgeois de Nivelles et fournir une caution de 4,000 florins. Les propositions seraient dorénavant soumises aux trois membres par le premier juré ou le pensionnaire ; elles seraient considérées comme adoptées dès qu'elles seraient accueillies par deux des membres, et, dans le sein de chaque membre, par la majorité des personnes qui en faisaient partie. Les maîtres des métiers ou troisième membre ne devaient plus être convoqués que pour des affaires importantes, et seulement par les soins du premier juré ou de son consentement. Les émoluments des magistrats furent maintenus à leur ancien taux, sauf que ceux du premier juré furent fixés à 150 florins.
Ces dispositions n'ayant pas calmé tous les dissentiments, on y ajouta un règlement additionnel, où on inséra de nouvelles mesures restrictives. On réduisit de seize à huit le nombre des maîtres des métiers. Chaque métier présentait aux jurés et aux échevins, le jour de sainte Catherine, une liste triple de candidats, parmi lesquels ces magistrats faisaient leur choix. Nul ne pouvait être élevé à ces fonctions ni à celles de juré s'il était procureur postulant par devant un échevinage ou un autre tribunal, ou officier assermenté de l'abbesse du chapitre. Aucun des trois membres ne pouvait s'assembler hors de l'hôtel de ville, sinon les échevins, lorsqu'ils avaient à rendre la justice. Tous les banquets, rétributions en vin etc. furent supprimés sans réserve (19 novembre 1676). Lorsque, le 7 janvier suivant, les deux premiers membres procédèrent à l'élection des maîtres des métiers, il s'éleva une assez vive discussion à propos de l'article 13 du règlement additionnel: les nouveaux maîtres des métiers déclarèrent qu'ils n'entendaient pas intervenir dans le procès que leurs prédécesseurs soutenaient contre François de Huberlant, et que, dans leur opinion, la ville n'était pas tenue d'en payer les frais. Les jurés et les échevins ayant observé qu'ils s'étaient déjà prononcés dans le même sens, le 13 novembre précédent, les anciens maîtres des métiers purent considérer cette dépense comme devant tombera leur charge ; mais, à la suite d'une nouvelle délibération, la ville consentit à la payer (8 octobre 1677).
L'année 1664 fut marquée par la célébration d'un jubilé en l'honneur de sainte Gertrude, qui, dans l'opinion de cette époque, était morte en 664. Ce jubilé dura huit jours. De grandes contestations s'étaient alors élevées au sein du chapitre. Une des chanoinesses, Melle de Sainte-Aldegonde, confiante dans l'appui qu'elle espérait trouver à la cour, intriguait pour être nommée coadjutrice de l'abbesse. Celle-ci, en ayant été avertie, en informa le chapitre. Dans une réunion qui eut lieu le 24 février 1664, on observa à cette demoiselle que ses prétentions étaient contraires aux statuts et, quoiqu'elle assurât ne pas savoir ce que l'on voulait dire, on chargea les chanoinesses Desclef et de Falais et le chanoine Loyens de faire les démarches nécessaires pour s'opposer aux siennes, et de se rendre à cet effet, soit à Bruxelles, soit en Espagne. Afin de témoigner de leur ferme résolution, les chanoinesses, sauf Eléonore-Bonne de Sainte-Aldegonde et sa nièce Claire-Ferdinande, signèrent toutes une union contre la coadjutorerie projetée (3 mars). Le bruit s'étant répandu à Bruxelles que leurs sentiments n'étaient pas les mêmes, les chanoines prirent une résolution analogue, le 17 du même mois. Le chapitre reçut, le 14 avril, communication de deux lettres qui mirent fin à ses craintes: le gouverneur général informa l'abbesse de son intention de combattre le projet d'une coadjutorerie ; le comte de Marsin annonça, de son côté, que les démarches faites auprès du roi et du conseil de Flandre à Madrid avaient abouti à un ordre au gouverneur général de cesser d'insister en faveur de cette innovation.
Vers l'année 1664, une dame du sang royal, Marie-Catherine d'Autriche, fille naturelle de don Juan d'Autriche, grand prieur de Castille dans l'ordre de Malte, et qui avait été gouverneur des Pays-Bas pour le roi Philippe IV (dont il était le fils illégitime), fut désignée par le roi Charles II pour succéder, à sa mort, à l'abbesse Madelaine-Thérèse de Noyelles ; mais le chapitre éleva de nouveau tant de réclamations, que cette dame dut renoncer à ses prétentions. Marie-Catherine d'Autriche mourut, le 26 novembre 1714, à Bruxelles, où son corps fut déposé dans le couvent de Berlaimont.
L'année 1667 vit recommencer les guerres entre l'Espagne et la France, qui avaient cessé six années auparavant. Le 8 mai 1667, on conduisit les reliques de sainte Gertrude à Bruxelles, chez le prévôt, Alphonse de Berghes, et, le surlendemain, le chapitre autorisa ceux de ses membres qui resteraient à Nivelles à disposer tout pour le mieux, en cas de siège ou de prise de la ville. Le gouvernement espagnol, qui n'avait que des moyens insuffisants de résistance, exigeait de ses sujets des efforts inouïs. Il manda aux Nivellois de se défendre autant que possible, et de se garder de prendre une sauvegarde de l'ennemi, sous peine d'être traités à feu et à sang. Mais que pouvaient faire les petites villes, sinon se munir contre un coup de main, placer des gardes et un guetteur, et envoyer aux environs des reconnaissances. Le 1er juin. Nivelles, fort inutilement, envoya à Bruxelles des députés chargés de solliciter des secours. Le roi Louis XIV et son armée étant venus occuper Renisart (sur Arquennes), le comte de Duras approcha de la ville ; par ses ordres, un trompette toucha l'appel à la barrière de la porte de Mons, et somma les habitants de se rendre, les menaçant, en cas de refus, de pillage et de feu, et ne leur donnant qu'une demi-heure pour se décider. Après en avoir délibéré avec les principaux bourgeois, quelques membres du chapitre, le gardien des récollets et le recteur des jésuites, le magistrat chargea Emmanuel-François Compère dit de Prelle, premier juré, le maire Jérôme Sibille, l'échevin Jacques Bomal et le receveur Adrien Perceval, de se présenter, en son nom, au monarque français, pour lui déclarer que Nivelles n'entendait faire aucune résistance, qu'il n'y avait ni garnison, ni munitions de guerre (17 juin). Le 1er août, vers les 5 heures après-midi, la garnison de Charleroi et d'autres troupes françaises s'avancèrent jusqu'aux portes de la ville.
Les ennemis incendièrent plusieurs fermes et le faubourg Al Saulx, qui était alors le plus considérable des faubourgs. Ils menacèrent de revenir plus nombreux trois jours après et de «planter des canons » devant les murs. Les trois membres, afin d'apaiser les murmures du peuple, résolurent d'envoyer des députés à Charleroi pour négocier. Les pères jésuites partirent d'abord, afin d'obtenir des laissez-passer pour les députés du magistrat, et ceux-ci consentirent à payer, pour une demi-année de contribution, 200 pistoles, dont le chapitre promit de donner le cinquième. On sut alors que la nouvelle agression des Français avait été provoquée par l'enlèvement de quelques chevaux, opéré à Braine-le-Comte par des Nivellois et d'autres sujets de l'Espagne, pendant que la députation de la commune allait trouver Louis XIV.
Peu de temps après, le célèbre Turenne ayant menacé Nivelles d'une démolition complète de ses remparts, si la ville n'était déclarée neutre, neutralité à laquelle il était disposé à consentir si les Espagnols voulaient s'engager à ne pas y mettre de garnison, l'abbesse et le chapitre demandèrent au gouverneur général des Pays-Bas l'autorisation de traiter avec la France de cette neutralité. Cette autorisation fut accordée le 3 octobre, et la neutralité garantie par une déclaration du vicomte de Turenne, maréchal général des camps et armées du roi Louis XIV, datée de son camp de Gamerages, le 8 octobre. Le corps saint ne revint de Bruxelles qu'au mois de juin suivant. Le 22 mai 1668, les généraux français ducs de Roannez et de Praslin étaient venus camper à un quart de lieue de la ville, les magistrats, accompagnés de quelques mayeurs ou maires des localités du voisinage, leur présentèrent 100 pistoles d'or, afin d'obtenir que Nivelles et les villages adjacents ne fussent pas « logés, courus, fourragés et molestés ».
Le 28 août 1669, on publia une ordonnance ayant pour but d'empêcher les progrès de la peste qui sévissait alors, mais qui ne frappa pas Nivelles, à ce qu'il semble, autant que d'autres localités, notamment Bruxelles.
Le bruit s'étant répandu que le gouvernement espagnol était décidé à faire abattre les portes et les fortifications, comme il avait démantelé Soignies et Braine-le-Comte, la ville résolut de prier l’abbesse d'employer son influence à empêcher cette mesure, et afin de l'y décider davantage, elle porta de 200 florins à 600 l'allocation qu'elle avait votée en sa faveur, pour l'indemniser de ce que le gouverneur général avait logé dans son hôtel (21 mars 1671). La même année, un bourgeois, nommé Maton, ayant été emprisonné sans la permission des jurés, ceux-ci, réunis en corps et accompagnés d'hommes armés, se présentèrent devant la prison, exigèrent la délivrance de ce bourgeois, puis, de concert avec l'officier fiscal, adressèrent au conseil de Brabant une plainte contre cet acte arbitraire des maires et échevins.
En 1672, la guerre entre la France et les Provinces-Unies faisant prévoir une rupture entre la première de ces puissances et l'Espagne, rupture qui en effet ne tarda pas, le chapitre résolut de réfugier le corps saint à Bruxelles (3 mars) ; mais on ne donna pas suite, selon toute apparence, à cette décision, car on la renouvela le 13 octobre 1673. On transporta alors les restes de sainte Gertrude dans la capitale, au couvent de Berlaimont. Le 19, le baron de Chauvillers entra en ville, à la tête de six compagnies de cavalerie et de deux d'infanterie ; il obtint du chapitre l'autorisation de placer les chevaux de sa troupe dans les alloirs (ou galeries construites latéralement à la crypte de la collégiale), du côté de la grande école. Cet officier, lors de son départ, au mois d'octobre, invita la commune à achever les travaux commencés pour l'amélioration des fortifications. Mais déjà on négociait un nouvel acte de neutralité, qui fut signé le 25 octobre par le gouverneur général comte de Monterey, et le 4 novembre par le prince de Condé. Pour se mettre à l'abri des vexations des Français, la ville consentit à payer une contribution de guerre de 4,000 florins par an, payables à compter du 16 novembre 1673, outre 420 florins pour des sauvegardes qui y avaient été placées à l'ouverture des hostilités.
Malgré ces conventions, la ville fut attaquée par les Français, le 1er juin 1674, et, dans le combat périt un étudiant, que l'on ensevelit à la collégiale. Mais cet engagement n'était que le fait de soldats débandés de l'armée ennemie, alors campée à Thiméon, et des députés étant allés, non sans de grands risques, avertir le prince de Condé, ce général envoya à Nivelles le seigneur de Belville et 14 cavaliers de ses gardes, dont l'approche mit fin à la bagarre. Le 29 du même mois, la ville fut autorisée à désobstruer ses portes, qu'on lui avait ordonné d'enterrer, c'est-à-dire de fermer à l'aide de remblais, le 30 mai précédent. A quelque temps de là, les armées alliées s'étant établies aux portes de la ville, un grand nombre de leurs soldats essayèrent d'entrer dans Nivelles ; on ne put les en empêcher qu'en demandant aux généraux un détachement de 200 hommes du régiment du comte de Naumont.
En 1675, les ravages des Français causèrent d'incalculables dégâts dans tout le pays. La prévôté ayant envoyé le recteur des jésuites au roi Louis XIV, au nom du chapitre et de la ville, pour implorer sa protection, et ayant donné à cet ecclésiastique 3 patacons pour ses frais de route, cette dépense fut ratifiée dans l'assemblée capitulaire du 21 mai. Ce jour là, la commune fut autorisée à prendre des sauvegardes françaises. Le 7 septembre, les armées espagnole et hollandaise arrivèrent à l'improviste aux portes de Nivelles ; le gouverneur général, duc de Villa-Hormosa, qui prit son quartier général au faubourg de Mons, ordonna, le 26, de faire complètement boucher les portes de Chaude-Rue, de Sainte-Anne et de Bruxelles, afin de faciliter la garde des remparts. En 1676, la ruine des campagnes était si complète que le chapitre ne toucha rien de ses revenus, et cependant la ville insistait pour que ce corps payât le cinquième de sa cote dans les aides et les contributions de guerre. L'abbesse et le chapitre prétendaient qu'au lieu du cinquième des aides, ils n'en auraient dû payer que le soixantième, attendu qu'ils ne possédaient à Nivelles que quelques terres et dix-huit maisons claustrales. La longue guerre qui s'était terminée en 1660, par le traité des Pyrénées, leur avait causé de grandes pertes, puis les grains s'étaient vendus à vil prix jusqu'en 1673. En 1666, ils devaient encore 5400 florins, que les guerres de 1667 et de 1673 ne leur avaient pas permis de payer. Les trois années suivantes les avaient presque complètement ruinés ; la majeure partie des paysans avaient fui, laissant leurs terres en friche ; ils s'étaient vus forcés d'emprunter pour vivre et de renvoyer à leurs parents plusieurs chanoinesses et écolières. Après avoir consulté les états de Brabant, et de l'avis de l'avocat fiscal, le gouverneur général accorda à l'abbesse et au chapitre remise d'une somme de 3607 livres de 40 gros (16 mars 1677). Le cinquième que la ville réclamait dans la contribution de guerre montait à 2,725 florins.
En mars 1677, les Français quittèrent Nivelles, où, malgré leurs engagements, ils avaient accablé les habitants d'exactions. Lorsque l'armée alliée s'approcha à son tour, elle se livra aussi à des désordres et à des pillages, que l'on ne put empêcher qu'en demandant au gouverneur général l'envoi d'un officier et de trois cavaliers de ses gardes. Un grand nombre de paysans, notamment de Feluy, de Seneffe etc. étaient réfugiés en ville avec leur bétail. Comme ce bétail épuisait les prairies et les remplissait d'ordures, ordre fut donné à ces malheureux fugitifs de quitter la ville et sa juridiction (9 août 1677). De nouvelles lettres de neutralité furent accordées à cette époque: d'une part, le 17 octobre, par le roi de France, en considération de ce que le chapitre devait sa fondation à une princesse de ce pays ; d'autre part, le 27 décembre, par le gouverneur général, alors campé à La Hulpe. Bientôt le calme commença à renaître. Le 24 avril 1676, le chapitre avait donné ordre d'aller prendre à Bruxelles le « coffre aux papiers de la vieille trésorerie ».
Le 24 septembre 1678, il résolut de faire revenir de la même ville le corps saint, à l’ occasion de la Saint-Michel, sauf à le renvoyer le lundi suivant. Enfin, le 3 janvier 1679, un Te Deum fut chanté à l'occasion de la paix de Nimègue.
La conduite tyrannique de Louis XIV faillit bientôt remettre l'Europe en feu, mais l'Espagne resta sans appui, et, en 1684, les troupes du « grand roi » dévastèrent sans merci et presque sans rencontrer d'obstacles nos contrées jadis si florissantes. Telle était la détresse du chapitre, que ce corps sollicita, comme une faveur insigne, de pouvoir s'approprier, pendant six années, les revenus des douze premières prébendes, moitié masculines, moitié féminines, qui deviendraient vacantes; le gouvernement y consentit, de l'avis conforme de l'évêque de Namur et du fiscal de Brabant (6 septembre 1685). La ville n'était pas moins obérée, et, ce qui augmentait la détresse des bourgeois, c'est qu'une bonne partie du territoire situé à l'intérieur des murs appartenait à des mains-mortes. En effet, sur 25 bonniers, à 20 pieds de Nivelles la verge, il s'en trouvait: 1 b. 9 verges occupée par la collégiale, les églises de Notre-Dame et de Saint-Paul, le cloître, la maison abbatiale ; 6 journaux 46 v. occupés par les maisons du chapitre, la Maison des choraux, le refuge de Bois-Seigneur-lsaac, l'Aire Saint-Paul et le jardin des arbalétriers ; 1 journal 52 v. occupés par les églises paroissiales ; 1 bonnier 53 v. occupés par les hôpitaux et hospices et le refuge de l'abbaye du Parc ; 2 journaux 2 verges occupés par le refuge de l'évêque de Namur, celui de Chantraine, celui de Villers et la maison judiciaire du fief de Rognon. En outre, les marchés, les rues, les remparts, la halle au blé absorbaient encore 4 bonniers 35 verges. Nivelles possédait déjà cinq couvents: ceux des récollets, des guillemins, des jésuites, des sœurs grises, des annonciadesv; les carmes s'y installèrent aussi, malgré une opposition énergique et persistante, et, dans cette occasion, notre impuissant gouvernement n'eut pas le courage d'imiter la conduite des archiducs Albert et Isabelle, qui, malgré leur profonde piété, surent refuser aux capucins l'autorisation de s'établir à Nivelles, parce qu'ils jugèrent l'admission de cette communauté inutile et de nature à devenir onéreuse pour une localité peu prospère.
Les haines que la politique de Louis XIV avait soulevées contre la France amenèrent enfin la formation d'une nouvelle coalition, et la guerre reprit en 1689. Le 23 avril, le corps saint, l'argenterie et les principaux ornements de l'église de Sainte-Gertrude partirent de nouveau pour Bruxelles et le couvent de Berlaimont. En 1690, la ville étant surchargée de garnison, le chapitre permit de placer les chevaux de cette dernière, pendant quelque temps, dans les alloirs (23 novembre). L'année suivante, après avoir pressé Nivelles pour le paiement de sa contribution de guerre, les Français voulurent la démanteler. Le 10 juin, le major-général d'Artagnan y arriva, par ordre du duc de Luxembourg, et fit pratiquer des brèches dans les remparts. Mais cette démonstration avait surtout pour but, selon toute apparence, d'arracher de l'argent aux habitants. L'abbesse parvint à sauver les fortifications en négociant la reconnaissance de la neutralité de Nivelles, à laquelle Louis XIV consentit, le 2 octobre 1692. En 1693, ce fut aux environs de la ville que le duc de Luxembourg concentra son armée. Tout le pays voisin fut ravagé par les marches et les contremarches des armées belligérantes jusqu'en 1697, qu'un Te Deum fut chanté à l'occasion de la paix de Ryswyck. le 3 novembre. Le 24 septembre de cette année, le corps saint fut ramené de Bruxelles, et 30 patacons furent payés par le chapitre aux dames de Berlaimont, qui lui avaient donné asile.
Le premier tiers du XVIIIe siècle se distingue par le petit nombre et le peu d'importance des événements qui se rattachent à l'histoire de Nivelles comme à celle du pays tout entier. Pendant la guerre qui éclata en 1701, entre Louis XIV et son petit-fils Philippe V, devenu roi d'Espagne, d'une part, et l'Angleterre, les Provinces-Unies et l'Autriche coalisées, d'autre parti, Nivelles reçut souvent des garnisons, qu'on logeait d'ordinaire dans les alloirs (résolutions du chapitre, du 23 novembre 1690, du 28 mai 1704, du 26 février 1703, etc.), où, en d'autres occasions, on plaça de l'avoine (résolution du 8 avril 1710) et d'autres approvisionnements, sans s'inquiéter du danger que pouvait courir la collégiale. Une ordonnance publiée le 11 novembre 1703, enjoignit «à un chacun de tenir sa chambre de soldat prête et à ceux qui n'en avoient pas de s'en pourvoir et à faulte de ce faire les soldats seroient logés dans leurs maisons». Ce document prouve, ce qui résulte d'ailleurs d'un grand nombre d'actes passés à cette époque, que les habitations comprenaient un quartier ou une chambre spécialement destinée à recevoir les militaires logés en ville et que l'on appelait la chambre de soldat.
Le 20 septembre 1704, l'électeur de Bavière, Maximilien-Emmanuel visita la ville et l'église de Sainte-Gertrude. Ce prince revenait d'Allemagne, où toutes ses espérances avaient été détruites par la bataille d'Höchstädt, qui lui enleva ses états héréditaires. Il était accompagné de son frère, l'archevêque de Cologne. La veille, le baron d'Ittre, alors grand bailli du Brabant wallon, et les trois membres l'avaient reçu à la porte de Charleroi, et le baron l'avait complimenté. La jeunesse et les trois compagnies bourgeoises étaient rangées en haie depuis la porte jusqu'à l'hôtel du vicomte d'Arnemuiden, où l'électeur logea. La ville lui présenta 12 cannes de vin et en offrit autant à l'archevêque.
L'entrée de madame de Berghes en qualité d'abbesse, le 15 mai 1706, fut signalée par une altercation entre le maire et le premier juré. Le maire ayant fait prêter à l'abbesse son serment d'une façon précipitée, et avant qu'on en eût fini la lecture, le premier juré, ses collègues et les maîtres des métiers demandèrent que l'abbesse le recommençât, et, en effet, elle se prêta à leurs désirs. Le soir, il y eut collation à l'hôtel-de-ville, on but à la santé du roi et de madame, et un feu de joie, allumé à neuf heures, annonça la fin des réjouissances.
La bataille de Ramillies ayant livré au général anglais Marlborough les Pays-Bas espagnols, le chapitre lui envoya le chanoine Troyen pour le complimenter (résolution du 27 mai 1706). Nivelles se trouva, pendant plusieurs années, exposée au milieu des armées belligérantes, la Belgique wallonne étant restée en partie au roi Philippe V et a l’électeur de Bavière, tandis que les villes de la Flandre et du Brabant obéissaient à la maison impériale d'Autriche et à ses alliés. Il en résistait parfois des épisodes assez bizarres. Ainsi, le 27 mai 1708, à l'annonce de la prochaine arrivée du duc de Bourgogne et du duc de Vendôme, commandants de l'armée française, le magistrat chargea le premier juré d'aller porter ses compliments à ces généraux, tandis qu'il choisissait le pensionnaire pour remplir la même mission auprès des chefs de l'armée hollandaise. Le 12 avril 1710, le comte d'Eck, capitaine faisant fonctions de major, au nom du prince de Holstein-Beck, colonel du régiment impérial de Bohème, général-major au service de l'empereur, remit à la prévôté, pour être exposés clans la collégiale, dix drapeaux en place desquels il en avait donné d'autres à ses soldats. La guerre se faisait alors avec moins d'inhumanité que dans les luttes précédentes ; toutefois, un assez grand nombre de paysans et d'étrangers étaient encore réfugiés à Nivelles, et, en vertu d'une convention conclue pour le paiement de la contribution de guerre entre cette ville et les députés de la mairie, on les taxa, pour les objets et denrées qu'ils avaient avec eux: à 3 sous par tonne de bière et 2 sous par coffre et par muid de grain. Des visites étant nécessaires pour assurer le paiement de ces impôts, l'abbesse et le chapitre consentirent, le 19 juillet 1708, à ce qu'on en fit dans les maisons capitulaires comme dans les demeures des bourgeois.
De fréquents incendies, notamment ceux qui avaient ravagé et presque entièrement détruit les villes et bourgs du Rœulx, de Gembloux, de Fleurus, de Braine-l'Alleu et de Wavre, ayant appelé l'attention sur les dangers que présentaient les toitures en bois ou en paille, le magistrat de Nivelles sollicita et obtint du gouvernement un octroi qui lui permit:
1° d'imposer aux propriétaires des maisons couvertes de cette manière l'obligation de les munir d'une toiture d'ardoises, de tuiles ou de pierres, dans les six mois ;
2° de faire procéder à la démolition de ces toitures, pour le cas où les propriétaires ne voudraient ou ne pourraient supporter cette dépense, et de se procurer les fonds nécessaires en hypothéquant les maisons mêmes (8 août 1714).
En 1725, le chapitre se plaignit de ce que les trois membres avaient fait publier deux ordonnances pendant que le siège abbatial était vacant, sans faire mention de lui. Le magistrat, après avoir consulté les archives, répondit en alléguant qu'il avait agi comme de coutume et qu'il était prêt à reconnaître son erreur, si le chapitre pouvait lui prouver, par des exemples, qu'on avait jadis mentionné son nom en tête des ordonnances (7 février 1725). Quelques années après, l'abbesse et les échevins portèrent une ordonnance au sujet de la vente du poisson, du houblon etc. Les jurés et les maîtres des métiers réclamèrent aussitôt (23 février 1728), et l'abbesse leur renvoya son ordonnance, afin qu'elle fût revue par les trois membres et republiée suivant la formule ordinaire, mais elle ajouta qu'elle agissait ainsi en réservant ses droits et en maintenant les conclusions qu'elle avait posées devant le conseil de Brabant, pour qu'on lui reconnût « privativement », c'est-à-dire exclusivement, le droit de publier des règlements de ponce (14 mars 1728).
En 1736, une forte pluie étant tombée lors de la procession annuelle, le chapitre transmit aux magistrats, par la plus âgée des chanoinesses, l'ordre de rentrer dans la collégiale ; mais, « au grand préjudice du corps saint et des ornements », quelques-uns des jurés s'obstinèrent à continuer la marche, et le chapitre sévit contraint de suivre la procession, bon gré mal gré. Il en conçut un vif mécontentement, et le manifesta, le 25 septembre de l'année suivante, lorsque, suivant l'usage, le corps saint fut demandé par une députation, qui était composée de l'avocat Lemaire, premier juré ; du second juré, Montnoyer ; du pensionnaire, l'avocat Froment ; du lieutenant-maire Lescarf, de l'échevin Hourdoncq, des maîtres des métiers Allardin et Rofessart. La prévôté, présidente du chapitre, députa à l'abbesse, pour avoir son avis, la chanoinesse de Lannoy, le chanoine Fontaine et le secrétaire du chapitre, et l'abbesse fit savoir qu'elle était disposée à accorder au magistrat l'objet de sa demande, mais en signalant le juste mécontentement du chapitre pour ce qui s'était passé, en 1735. Le juré Froment ayant répondu en termes peu mesurés, que le peuple avait tout au moins autant de dévotion pour sainte-Gertrude que les chanoines et les chanoinesses, et l'avocat Lemaire s'étant écrié, par trois fois : « Ne l'accordez pas » ; le chapitre vit dans ces paroles des témoignages de mépris et en fit rapport à l'abbesse, qui fut d'avis d'ajourner toute décision jusqu'au lendemain. Le 26, une députation du magistrat s'étant présentée de nouveau, n'obtint qu'un refus de l'abbesse et du chapitre. Le magistrat fit encore une troisième démarche, en alléguant qu'il n'avait eu aucune part à ce qui s'était dit d'abord, et le chapitre consentit enfin, en considération des menaces et des démonstrations tumultueuses du peuple, dont le bruit parvenait jusqu'au lieu de ses séances.
A la mort de l'abbesse Charlotte de Berlaimont le siège abbatial resta vacant durant seize mois, par suite d'une circonstance assez extraordinaire, témoignage évident du zèle monastique qui régnait parmi les chanoinesses Les suffrages de ces dames et le choix du gouvernement de Bruxelles avaient appelé à la dignité d'abbesse un membre de la famille d'Ingelheim. Mais la décision de l'impératrice Marie-Thérèse tarda trop longtemps: lorsqu'elle arriva, la future abbesse venait d'épouser un seigneur de Fauquez. L'avènement de la comtesse Ursule-Antoinette de Berlo de Francdouaire, qui fut désignée pour la remplacer, fut également marquée par un incident: le jour même de son entrée dans Nivelles, le 6 août 1744, un grand débat s'éleva entre les échevins et les jurés, au sujet du titre de princesse de Nivelles, que les premiers prétendaient lui donner et que les seconds lui déniaient.
La guerre de sept ans, de la France contre l'Autriche et l'Angleterre, vit se renouveler, plus perfectionné encore, le système d'exactions dans lequel excellaient les généraux de Louis XIV. Lorsque les troupes françaises vinrent camper à Feluy, en juillet 1745, MM. le marquis de Mouchy et de Beausobre imposèrent à Nivelles un certain nombre de blancs ou sauvegardes. En vain des députés du chapitre se rendirent à Feluy le 9 juillet, et d'autres (les chanoines Fontaine jeune et Bonnier) à Bost près de Sotteghem, auprès du roi. Ces derniers ne purent voir que le duc de Boufllers, qui leur conseilla de rester à Nivelles et ajouta, pour ce qui concernait les blancs, que cela ne le regardait pas.
Le 13 septembre, Mouchy enjoignit au magistrat de faire renouveler ces blancs dont chacun coûtait 30 couronnes), sous peine d'exécution militaire, et comme on lui faisait observer que Nivelles payait une contribution de guerre, lui et Beausobre répondirent qu'en cas de retard, dans le paiement, l'exécution militaire aurait lieu dès le lendemain, à 4 heures du matin. Il fallut se résigner à payer immédiatement à ces avides capitaines 480 couronnes pour 16 blancs. Au mois de janvier 1746, le maréchal de Saxe, voulant investir Bruxelles, ordonna au général d'Armentières de se porter sur Nivelles. D'Armentières avait avec lui quatre bataillons et sept escadrons; il espérait emporter facilement cette place ; mais le major suisse May, qui s'y trouvait avec 700 hommes, se défendit avec tant d'énergie que les ennemis furent obligés de se retirer (27-28 janvier). Toutefois, le voisinage d'une armée formidable ne permettant pas à May de prolonger sa défense, il battit en retraite, et le maréchal fit occuper la ville par le brigadier de Beaucourt, lieutenant-colonel du régiment de Fleury, que le magistrat alla complimenter le 5 février. Le 28, les chanoines Fontaine jeune et Bonnier, le premier juré de Monnoyer et le maire Duhoux se rendirent à Bruxelles auprès du maréchal de Saxe, qui les reçut assez mal. Ce général avait ordonné à ses ingénieurs de faire sauter les portes de la ville, dans la prévision que les Autrichiens pourraient de nouveau s'y établir et s'y fortifier. Cet ordre fut exécuté, comme l'atteste le chronogramme: GaLLV.s DIrVplt MVros ostlaqVe eXVsslt NlVeLLIs, mais seulement d'une manière partielle.
Bientôt M. d'Armentières somma la ville de racheter ses cloches, moyennant 200 louis. On lui objecta inutilement que Nivelles n'avait pas été assiégée ; il répliqua qu'il l'avait bombardée et canonnée le 27 ou 28 janvier ; enfin, on s'accorda avec un de ses officiers, nommé Montalembert, pour 800 livres, outre un cheval de la valeur de neuf pistoles, soit ensemble pour 450 florins courants. Par bonheur, le comte d'Eu, grand-maître de l'artillerie se montra plus conciliant ; il jugea qu'une petite ville n'était pas tenue à racheter ses cloches, et M. de Monlalembert fut forcé de restituer le fruit de ses exactions.
Après la prise de Bruxelles, Louis XV rejoignit son armée et fit son entrée triomphale dans la capitale des Pays-Bas autrichiens. Le chapitre, afin de se concilier ce prince, lui envoya une députation composée des chanoinesses de Croix, de Berghes-Saint-Winoc, de Warligny et Guttemberg aînée (mai 1746). A quelque temps de là, le prince de Conti investit Mons, et de l'abbaye de Bélian, où il avait pris son quartier-général, il somma le chapitre, le magistrat et le maire de Nivelles de fournir des vivres à son corps d'armée. Ce général ayant déclaré accorder aux biens du chapitre sa protection et une exemption complète de fourragement, les chanoines firent planter des croix de paille aux limites de leurs domaines, notamment à Buzet, et, en remercîment, envoyèrent au prince quelques pièces de gibier (4 août). Afin de pourvoir aux besoins immenses de l'armée de Louis XV, les Etats de nos provinces firent partout réunir de grands approvisionnements. Le magistrat de Nivelles, invité à préparer pour cet objet un local, demanda au chapitre de pouvoir disposer de la grande école et des alloirs, pour y mettre de l'avoine, du foin et de la paille. Dans la crainte d'un incendie, incendie qui pouvait à chaque instant être causé par l'imprudence d'un soldat, les chanoines ne voulurent d'abord tolérer qu'un magasin d'avoine dans l'école ; toutefois, le magistrat, ayant insisté, ils permirent de placer du foin dans les alloirs, mais seulement du côté voûté, et non là où il n'y avait qu'un plancher.
Le commandement de Nivelles avait été confié au colonel et brigadier de Grassin, que le marquis du Châtelet remplaça au mois d'octobre 1747. Le traité de paix d'Aix-la-Chapelle, en 1748, et le départ des Français furent fêtés par nos populations avec une joie indicible. Au mois de mars 1749, on ordonna une procession solennelle pour remercier Dieu d'avoir écarté les dangers que faisaient courir à la collégiale et à la ville les écuries et les magasins récemment établis, et, le 17, le corps de sainte Gertrude fut retiré du lieu où on l'avait caché, et replacé sur l'autel. Le soir, il y eut un feu d'artifice et une illumination si générale, qu'au dire d'un chroniqueur, le moindre paysan avait placé des chandelles à sa fenêtre.
Un jugement du conseil de Brabant, en date du 18 avril 1750, fixa à un dixième la part du chapitre dans les contributions et exactions de toute espèce que les Français avaient demandées à la ville pendant la dernière guerre.
Les années de paix qui suivirent furent marquées par la création du réseau de routes qui entourent Nivelles, et plus encore par de longs débats entre l'abbesse et le chapitre, d'une part, et le corps des jurés, de l'autre, luttes qui se terminèrent par la suppression de ces derniers. Le gouvernement espagnol avait eu le triste honneur d'anéantir le collège des rentiers, qui pendant plusieurs siècles avait administré la ville avec intelligence et avec courage, dans les moments les plus difficiles, et qui, en défendant les droits de la commune, avait également servi les intérêts du prince. Le gouvernement autrichien compléta son œuvre en supprimant les jurés, coupables des mêmes crimes.
Déjà, en l'année 1643, l'avocat fiscal de Brabant avait contesté à l'abbesse de Lannoy le droit de se qualifier de princesse de Nivelles, et avait voulu obliger cette dame à modifier les inscriptions placées par ses ordres sur les nouvelles cloches de la collégiale, mais ses poursuites furent arrêtées et pour le moment abandonnées. Un siècle plus tard, lors de la proclamation de l'abbesse de Berlo, la querelle recommença, cette fois, entre le maire et les échevins, d'une part, et les jurés, de l'autre.
Le 6 août 1744 lorsque cette dame fut inaugurée, le premier juré porta sa santé, en lui donnant simplement le titre de dame de Nivelles. Alors se passa une scène extrêmement scandaleuse. Le maire et les échevins, appuyés par les maîtres des métiers, insistèrent pour la qualifier de princesse ; les jurés et le pensionnaire, s'y étant refusés, furent insultés et durent se retirer. Le procureur général porta l'affaire devant le conseil de Brabant et un décret du gouverneur général, le prince Charles de Lorraine, du 19 février 1754, interdit à l'abbesse de prendre le titre contesté. Madame de Berlo demanda le renvoi de cette affaire en justice réglée ; il lui fut répondu qu'elle n'aurait droit à la qualification de princesse que lorsqu'elle aurait produit ses titres, et que cette production était, absolument indispensable, un décret, du 22 octobre 1755 termina l'affaire en ce sens et enjoignit de biffer le mot de princesse dans tous les actes où il figurait.
Battue de ce côté, Mme de Lannoy querella les jurés sur un point bien plus important. On avait déjà songé à terminer les conflits éternels du chapitre et de la commune en supprimant, non le premier, mais la dernière. Sous le règne de Philippe V, règne dont la courte durée fut signalée par de nombreuses modifications apportées à nos institutions de tout genre, le conseil royal et l'abbesse de Noyelles s'étaient entendus pour unir les jurés aux échevins, et le chapitre avait donné son adhésion à ce projet (8 mai 1706), en se bornant à demander pour le maire une augmentation de traitement et la confirmation de son antique prérogative de recevoir seul le serment des maîtres des métiers. Ce but fut enfin atteint, mais après de longues procédures. Madame de Berlo et les défenseurs de sa cause s'efforcèrent d'amoindrir l'importance du corps des jurés: « ils ne datent que de deux siècles, ils ne font pas partie du magistrat, ils n'ont aucun droit de police, ni le droit de publier des ordonnances, d'inspecter les rues ou les bâtiments, de maintenir la propreté et le bon aspect de la ville. Leurs véritables attributions se bornent à la perception des assises, la décision des affaires qui s'y rattachent et la surveillance des travaux publics. L'abbesse seule est dame de Nivelles, et en réalité, toute la ville, sauf 7 à 8 maisons, lui appartient. C'est comme émanant d'elle que se publient les ordonnances de police, publication qui est annoncée par celte formule: « Oyez seigneurs, oyez de par Madame et les trois membres de la ville de Nivelles ». Ses droits à cet égard sont si bien établis qu'on vient lire à l'abbesse, en son hôtel, les conditions de l'affermage des assises».
Les jurés ne se laissèrent pas dépouiller sans combat. Ils puisèrent dans les archives des données dont l'exactitude ne put sauver leur cause Ainsi ils dirent que l'abbesse n'avait que quelque bien à Nivelles et en effet, c'est ce qui avait été allégué, au nom de celle-ci, lorsqu'il s'était agi de reporter sur l'abbatialité et le chapitre une part des charges imposées à la ville. Les jurés ajoutèrent que l'abbesse n'était pas dame de la ville, mais seulement d'un fief qui y était enclavé, et, en effet, l'étendue respective de la ville et du fief de Rognon justifiait leur assertion. Ils firent valoir que, lors de son élection, l'abbesse devait leur présenter ses patentes originales et promettre au premier juré d'observer les chartes municipales. Ils alléguèrent la surveillance qu'ils exerçaient sur les remparts, les portes, les fossés, les chaussées, les cours d'eau ; leur droit de donner en arrentement des parcelles de la voirie et d'autoriser les empiétements sur la voirie ; déjuger des délits qui se commettaient dans lès lieux publics, les biens domaniaux, ainsi que ceux qui se rattachaient aux assises ; de publier des règlements et ordonnances, de répartir les logements militaires, d'établir des messageries vers les localités voisines, de louer les biens de la ville, le produit de l'enlèvement des boues etc. Enfin, les jurés, voulant rendre à leur adversaire le coup qu'il leur portait, demandèrent au comte de Cobenzl, le principal ministre du prince Charles, de leur attribuer toute la police et toute l'autorité sur les corps de métiers, en ne laissant aux échevins que la juridiction en matière contentieuse. Le chapitre, averti par l'abbesse, s'unit à celle-ci pour repousser ces prétentions (11 août 1739), et peu de temps après intervint un jugement du conseil de Brabant qui reconnut madame de Berlo en qualité de dame de Nivelles (28 août 1759).
Les frais occasionnés par ce procès devinrent la source de grandes contestations entre les jurés, d'une part, et les échevins, soutenus par les corps de métiers, d'autre part. Ces derniers étaient à la dévotion du chapitre, par suite de la grande influence que ses membres avaient sur les marchands et détaillants de toute espèce. Complètement oublieux ou insoucieux des droits de la commune, ils auraient voulu imposer aux jurés seuls l'obligation de solder les frais de la procédure. La lutte continua. Le projet pour l'union de l'échevinage et du corps des jurés instituait un échevinage de sept membres, qui seraient nommés tous les ans :
- quatre par le gouvernement et trois par l'abbesse la première année, et vice-versa ;
- l'année suivante; le maire, le greffier et l'huissier continueraient à être à la nomination de l'abbesse, tandis que les fonctions de premier juré seraient toujours conférées à un des échevins créés par le prince ;
- on proposait en outre l'établissement de deux députés du dehors, qui représenteraient les seigneuries de Grambais, du Temple-Notre-Dame, du Temple en Neuve-Rue, de Heriamont etc. seraient choisis le jour de Sainte-Catherine dans une liste double de candidats présentée par les habitants de la banlieue, siégeraient avec les maîtres des métiers, et recevraient comme eux 50 florins le jour du renouvellement des échevins et 43 florins à la Saint-Rémi ;
- un maître des métiers et un député du dehors interviendraient dorénavant avec le maire et les trois premiers échevins à la vérification des comptes de la ville, vérification qui procurerait à chacune de ces six personnes une allocation de 3 patars par heure ;
- le choix du receveur de la ville était attribué au souverain.
On conçoit combien un projet pareil devait répugner aux partisans de l'indépendance communale. Que devenaient ces puissantes institutions du moyen-âge, dont nous avons vu l'indomptable fermeté et la persistance héroïque? Dans un mémoire du 15 octobre 1759, le juré F.-P. Marcq remontra inutilement l'ascendant que l'autorité abbatiale allait obtenir au détriment de celle du souverain ; on objecta aussi le tort que causerait à la ville la suppression de l'emploi de pensionnaire, dont les fonctions, confiées au greffier, livreraient à l'abbesse les archives et les droits de la ville ; l'avilissement des emplois publics qui, bientôt, de même que les places dans les hospices, ne se donneraient plus qu'à des laquais ; la dégradation de la magistrature, dont on verrait les membres envoyer leurs filles pour faire hommage à l'abbesse et lui offrir des pains de sucre, la veille du jour de l'an.
Un rapport du magistrat, du 20 novembre 1770, demanda de nouveau l'élimination des échevins du corps municipal et rappela les actes énergiques de la commune au XVe siècle. En 1773, un décret interdit à l'abbesse la voie de justice et réserva au gouvernement le soin de terminer la contestation. C'est alors que parut un second projet pour la réunion des jurés et des échevins, projet qui fut présenté par l'avocat Dept, mais dont la rédaction était due à la prévôté, comtesse d'Ingelheim. Un rapport du chancelier Crumpipen, du 3 mai 1775, entraîna le gouvernement dans le même sens, et la discussion aboutit enfin à un règlement qui annihila complètement la puissance communale au profit de l'influence du gouvernement et de celle de l'abbesse. Le corps que l'on substitua tout à la fois aux jurés et aux échevins sous le nom de magistrat, devait se composer d'un maire et de neuf échevins, assistés de deux greffiers, d'un receveur, de quatre valets de ville, d'un huissier et de deux sergents. Le maire et les secrétaires étaient nommés alternativement par le gouvernement et par l'abbesse, ainsi que le receveur ; le premier choisissait toujours les valets ; la seconde conférait les fonctions d'huissier et de sergents. Quand le maire en fonctions était un mandataire du gouvernement, celui-ci ne pouvait conférer que quatre places d'échevins, et réciproquement. Quand, dans le corps des échevins, les jurisconsultes formaient le plus grand nombre, ils pouvaient décider les causes civiles par eux-mêmes, sinon ils devraient prendre l'avis de deux avocats. Pour les causes criminelles, l'avis de deux jurisconsultes désignés à l'avance était indispensable. Tous les ans, le magistrat envoyait au conseiller commissaire du conseil de Brabant une liste de dix-huit personnes aptes à faire partie de l'échevinage et trois candidats à la place de receveur: c'était parmi elles qu'on choisissait, si le gouvernement jugeait convenable le renouvellement du magistrat. Les corps de métiers concouraient encore avec ce dernier à l'administration locale, mais dans une proportion presque dérisoire. Parmi leurs députés, réduits au nombre de sept, il n'y en avait plus que cinq qui restaient en fonctions, à tour de rôle : la première année, les députés des cinq premiers métiers ; la deuxième année, ceux du sixième, du septième et des trois premiers, et ainsi de suite. Encore ne les appelait-on que pour les affaires qui étaient de nature à être traitées avec le concours des représentations de métiers, c'est-à-dire, disons-le brutalement, lorsqu'il s'agissait de payer. Ce règlement déplorable, qui ne contient pas moins de 103 articles, ne devait pas vivre longtemps.
Vers la fin du mois de mars 1772, éclata au marché de Nivelles une émeute qui fut causée par la cherté des denrées et particulièrement du beurre, que les paysans ne voulaient vendre qu'au prix de 12 sous la grande livre de six quarterons, Une maison où s'étaient réfugiés quelques campagnards fut assaillie à coups de pierres ; par bonheur le maire Duhoux intervint et parvint à calmer la foule.
Le 5 mars 1775, à la mort de l'abbesse de Berlo, le chapitre notifia cet événement à l'impératrice par une lettre qui fut transmise au prince de Starhemberg, accompagnée d'une simple copie pour le prince Charles. Ce procédé fut trouvé à la cour de Bruxelles assez singulier. M. De Reul. secrétaire d'Etat, renvoya la missive au chapitre, en l'informant qu'il fallait écrire au gouverneur général et lui demander de désigner des commissaires, à l'effet de procéder à une élection nouvelle ; que tel était l'usage et que le gouvernement n'entendait pas s'en départir. Le chapitre prit, le 12, une résolution dans ce sens, et bientôt après eut lieu l'élection de Madame Vandernoot, la dernière des abbesses de l'antique chapitre de Nivelles.
L'empereur Joseph II, le fils et le successeur de Marie-Thérèse, se trouvant aux Pays-Bas, visita Nivelles le 21 juin 1781. Il y arriva à l’improviste, à 7 1/2 heures du soir, accompagné seulement du général Tercy. Il venait à cheval de Tervueren, suivi à quelque distance de son équipage. Ayant reconnu Mlle de Thurheim à la fenêtre de la maison de Mlle de Trips, il mit pied à terre, entra dans cette maison, et de là se rendit à l'hôtel abbatial, puis à l'église, où il fut reçu au son des cloches et où on chanta un Te Deum. Il ressortit de la collégiale, donnant la main à l'abbesse, et repartit pour Bruxelles à 9 1/2 heures, au milieu des acclamations prolongées de la population. Le 27 septembre suivant, on plaça à l'hôtel-de-ville son portrait, qui avait été peint par un nivellois, nommé Lons. Le 22 octobre, tes archiducs Albert de Saxe-Teschen et Marie-Christine, en allant à Marimont, s'arrêtèrent à Nivelles, où ils prirent du café à l'abbatialité et où les honneurs militaires leur furent rendus par les serments.
Bientôt les réformes de Joseph II, aussi louables au fond que mal combinées, vinrent répandre dans toutes les classes de la population le mécontentement et la défiance. La plupart des mesures adoptées par ce prince froissèrent particulièrement le clergé. De ce nombre furent: la réduction à douze des trente prébendes de chanoines existant à Nivelles (en 1781) ; la suppression du prieuré d'Orival et des couvents des Guillemins et des Annonciades ; la translation des cimetières hors ville, où on les réunit en un seul, qui fut établi près de la chapelle Saint-Pierre (1784) ; le nouveau règlement donné aux chanoinesses, en 1786. Mais l'empereur irrita surtout la nation belge en modifiant complètement notre organisation judiciaire. On considéra comme des instruments d'un despotisme antipathique à nos mœurs les tribunaux qu'il institua et dont on installa un à Nivelles, avec le rang de tribunal de première instance ; ce tribunal se composait d'un juge royal, à la nomination du roi, et de trois assesseurs choisis par les échevins et les cinq députés des métiers et qui furent en effet, élus le 31 mars 1787.
Les cercles d'intendance, institués par l'édit du 12 mars de la même année, furent accueillis avec encore moins de faveur. Nivelles, qui fut désignée pour être le chef-lieu d'un des cinq districts de l'intendance de Bruxelles, et le Brabant wallon avaient alors pour grand-bailli le chevalier de Ham, chevalier de l'ordre militaire de Marie-Thérèse, qui servait depuis 38 ans la maison d'Autriche. Par une lettre très énergique, datée du 28 février, ce gentilhomme donna sa démission, en alléguant que s'il admettait la suppression de son emploi, il violait le serment qu'il avait prêté lors de sa nomination, et que s'il réclamait le maintien des états du duché de Brabant, conformément à l'ancienne organisation du pays, il pourrait être, contre son gré, regardé comme un rebelle.
Pour maintenir la tranquillité publique, et aussi afin de satisfaire aux vœux du peuple, qui réclamait le maintien de ses antiques franchises, on organisa dans presque toutes les villes de la Belgique des troupes de volontaires. A Nivelles, le 9 juillet 1787, le chapitre accorda 400 florins aux officiers de la garde formée dans cette ville, afin de subvenir aux besoins des musiciens et autres personnes qui en faisaient partie et qui avaient été distraites de leurs occupations ordinaires. A plusieurs reprises des prières lurent ordonnées pour attirer sur le peuple la bénédiction divine, et lorsque le gouvernement des Pays-Bas crut devoir faire des concessions et donner satisfaction à l'opinion publique (21 septembre) le chapitre fit célébrer le lendemain un salut, et le dimanche suivant une messe solennelle d'actions de grâces. Quelques jours après, il fut question de célébrer la fête communale par la procession de la Saint-Michel. Le chapitre refusa d'abord d'y consentir, en alléguant l'édit du 10 mai 1786, qui restreignait considérablement le nombre des cérémonies de ce genre ; mais une députation de la ville se rendit à Bruxelles, et le gouvernement, de l'avis du procureur-général, qui se trouvait alors à Nivelles, déclara que rien ne s'opposait à la sortie de la procession.
Joseph II, en voulant persister dans la voie qu'il s'était tracée, ne fit que porter à l'excès le mécontentement général. Le 28 mai 1789, une nouvelle émeute éclata à Nivelles à propos de la cherté des grains ; le premier échevin acheta, au prix de 5 florins 4 sous, des grains, qu'il revendit ensuite moyennant 4 florins. En même temps, il appela aux armes un officier et huit hommes de chaque serment, mais il ne fut pas obéi. Bientôt l'invasion des patriotes augmenta le désordre, et le gouvernement autrichien perdit successivement toutes les provinces de la Belgique, sauf le Luxembourg. A Nivelles, les reliques de Sainte-Gertrude furent cachées le 7 octobre et ne reparurent que le 30 décembre. Le 24 novembre, le maire, M. de Wauthier, informa le magistrat de son départ et lui renvoya les clés des portes. Pendant qu'on se battait à Bruxelles, le seigneur de Mellet, comte de Clauwez, se présenta devant Nivelles, où il vint demander l'entrée pour la troupe qui l'accompagnait ; sur le refus des habitants, il alla loger à Vaillampont. Dans ce moment critique, le chapitre, à la demande de la commune, ordonna d'exposer le Saint-Sacrement (14 décembre). L'approche du danger avait forcé la bourgeoisie à prendre quelques mesures de précaution. Le 12, ordre fut donné de convoquer tous les jours 30 hommes des serments, dont 10 occuperaient la porte de Mons, 10 la porte de Bruxelles et 10 différents points des remparts; le soir, les nouvelles devenant de plus en plus inquiétantes, on porta la force de ces postes de 30 à 100 hommes ; et le lendemain, on résolut de charger de la garde des fortifications 20 hommes de chaque compagnie. L'arrivée de 200 patriotes (16 décembre) et la retraite des Autrichiens au-delà de la Meuse ayant calmé la terreur qui régnait en ville, quelques-uns des échevins, auxquels se joignirent, le 18, les chanoines Van Diest, Lacroix, Malfroid et Brehaye, formèrent un comité chargé spécialement de veiller aux besoins des pauvres et auquel le chapitre, qui avait déjà voté un don de 200 florins pour les indigents, envoya encore 600 florins, dont 200 pour les ouvriers qui avaient pris les armes. Une messe fut chantée en remerciement de ce que la ville avait été préservée de tout malheur.
Dans le moment d'exaltation qui suivit leur victoire, les patriotes organisèrent militairement la bourgeoisie de Nivelles dans des proportions excessives. Le 20, on créa pour elle tout un cadre d'état-major, au moins inutile. On nomma commandant en chef, Guillaume-Joseph, comte de Looz et de Corswarem, « libre comte régnant de Nyel, des princes comtes de Looz et du Saint-Empire, duc de Hesbaye etc. » ; major, M. Charlet, écuyer ; aide-major de place, Charles Bette ; capitaine des portes, George Dehoux ; lieutenant-colonel du commandant en chef, M. de Biedel ; lieutenant-colonel adjoint, le baron de Haultepenne, des comtes de Dommartin, qui tous prêtèrent serment. On se décida en même temps à organiser des volontaires qui recevraient 10 sous par jour et parmi lesquels on voulait surtout enrôler les ouvriers manquant de travail, qui auraient pu troubler la tranquillité publique. D'après un règlement qui fut arrêté le lendemain, chaque serment dut dorénavant former deux compagnies bourgeoises, fortes de 50 à 60 hommes, dont on donna le commandement à Charles Bette et Le Page, du serment des arbalétriers ; Emmanuel Bette et le notaire Francotte, du serment des archers ; et Michel Delporte et Adrien-Joseph Godeau, du serment des canonniers.
Les volontaires brabançons et hennuyers, en passant par Nivelles les 16 et 17 décembre, avaient témoigné beaucoup de mécontentement de ce qu'on avait laissé en place le double aigle, surmonté d'une couronne impériale, qui se trouvait de temps immémorial au-dessus du pignon du sanctuaire (ou du pignon terminal de l'abside), du côté du Marché au bétail ; ils avaient promis de le renverser s'ils le trouvaient encore à leur retour. C'est pourquoi on l'ôta, le 19 janvier 1790 et il ne fut replacé que le 1er décembre suivant. Le maire, M. de Wauthier, désigné à la vengeance populaire à cause de son dévouement pour Joseph II, fut arrêté à Manage sur Seneffe) par les volontaires patriotes et amené à Nivelles ; mais le conseil de Brabant déclara qu'il n'avait en rien démérité du pays et qu'il devait continuer à remplir ses fonctions, et ce jugement fut affiché en vertu d'une résolution du magistrat, en date du 3 avril.
Le parti Vandernootiste triompha complètement à Nivelles, où l'on s'efforça d'anéantir toutes les réformes introduites par Joseph II. Le chapitre de chanoines fut, au mois de mai, rétabli tel qu'il existait avant 1778. En outre, on fit de grands préparatifs pour fournir aux troupes nationales le matériel nécessaire et pour enflammer l'enthousiasme de la multitude. Le 18 janvier, à la demande de Vandermeersch, le général des patriotes, on lui avait remis les canons de la ville ; le 27 mai, le chapitre vota 90 louis pour en acheter trois autres, tandis que l'abbesse et le prévôt s'engageaient chacun à fournir un autre canon. Le même corps avait déjà consenti à un don patriotique de 2,000 florins (17 avril) ; il offrit, plus tard, en considération des lourdes charges qui pesaient sur la bourgeoisie, de payer tous les jours le salaire de deux hommes de la garde locale, aussi longtemps que cela serait nécessaire (5 juin).
Les excitations de toute espèce restèrent impuissantes à inspirer de l'héroïsme à un peuple dont on n'avait pas su encourager les généreux instincts, et les Autrichiens rétablirent sans peine leur domination. A cette époque, le corps saint fut de nouveau mis à l'abri du danger, du 25 novembre 1790 au 3 janvier 1791. Mais déjà grondait la révolution française, qui devait anéantir et la domination de l'Autriche et celle des castes qui avaient essayé de la détruire à leur profit exclusif. Un grand nombre de prêtres et de religieux vinrent demander un asile et des secours à nos corporations, qui se firent un honneur de les aider. Ainsi le chapitre de Nivelles accorda, le 28 février 1792, 50 louis aux moines de la Trappe, alors réfugiés à Fribourg, et, le 25 septembre suivant, 25 louis à des ecclésiastiques. Le gouvernement autrichien, qui se savait l'objet de la haine du parti Vandernootiste, était constamment excité à prendre des mesures énergiques contre les classes privilégiées. Un mémoire secret en date du 4 février 1792 et signé Carlier, notaire et procureur, signale l'abus criant des exemptions d'impôts. Les biens amortis (ou dont la propriété avait été reconnue aux ecclésiastiques) et les biens féodaux ne payaient rien dans l'aide lorsque leurs possesseurs les exploitaient en régie, et, pour une moitié seulement, lorsqu'ils étaient donnés en location ; en réalité, il n'y avait qu'un huitième des biens, c'est-à-dire la fraction restée entre les mains de la classe laborieuse, qui payait l'impôt, tandis qu'on exemptait les domaines des abbés et des nobles. Carlier ajoute que, d'après la rumeur publique, les gouverneurs-généraux allaient abandonner le pays au pillage pendant trois jours, qu'un propos de ce genre avait été tenu en sa présence, le 3 janvier.
L'irritation était devenue si générale qu'on accueillit avec de grandes marques de sympathie, les Français, après leur victoire de Jemappes. Le 13 novembre, vers les 4 heures, arriva le général Valence, dont les troupes campèrent près de l'ermitage des Sept-Douleurs. Le chapitre le fit complimenter par son secrétaire Fécher et par le bailli Biourge, à qui Valence répondit que ses compagnons d'armes n'avaient pour but que de réintégrer chacun dans ses droits, phrase banale dont nous apprîmes bientôt à connaître la portée. Le lendemain, les bourgeois, réunis aux Récollets, nommèrent dix-sept administrateurs : Demoullin, Robert, de Villers, Lefebvre, Narez, l'avocat Lemaire, Faignart, Col, Dubois jeune, Bourgeois, Charles Belle, Medar, Daras, Brackman, Waflaert, Didion et Derbaix, et quatre suppléants: Randoux, Edouard, Lebrun et Roulez père. De Villers, Lemaire et Bette n'ayant pas accepté, furent remplacés par Randoux, Dubois père et Rascar. Les autres prêtèrent serment le 15, dans l'église de Notre-Dame.
La déchéance de la maison d'Autriche fut proclamée le 24 ; mais une scission complète ne tarda pas à éclater entre les partisans des idées françaises et, leurs antagonistes. Le 18 décembre eut lieu, au collège épiscopal, une assemblée populaire où l'on émit le vœu de voir éliminer les administrateurs en fonction et où on vota le rétablissement de l'ancien échevinage, auquel seraient adjoints vingt citoyens chargés plus spécialement des affaires civiles, politiques et contentieuses. Ces vingt élus furent : Charlé, président ; les notaires Froment, Waulhy, Roulez, Troye, Paradis : les avocats De Marbaix, Berlàimont, Le Clercq, Lemaire, Parmentier ; les médecins Delporte et Bomal ; le licencié en droit Dept et Narez, qui furent désignés pour secrétaires ; le licencié en droit De la Nieppe ; le receveur Fécher, le vitrier Daras, le curé Malcorps, le chanoine Dept, le brasseur F. Pigeolet et l'orfèvre Pigeolet père. Tous furent immédiatement conduits à la maison communale et installés, sauf Narez, qui envoya sa démission et à qui on substitua Paradis comme secrétaire. Ce mouvement réactionnaire fut bientôt comprimé. Le 19, ordre fut donné à un détachement de 200 hommes du bataillon des Lombards, sous les ordres du lieutenant-colonel Lavalette, de partir pour Nivelles, et de s'y tenir à la disposition du citoyen Metman. Cet agent de la république française refusa de reconnaître les nouveaux administrateurs, et une autre élection, faite sous ses auspices, à Notre-Dame, porta son choix sur les citoyens De la Nieppe, Prosper Jalhay, Desbille, médecin ; Charlé, Bomal, médecin ; Paradis, Deppe et Lebon, notaires; Dereusme, pharmacien ; Pigeolet, brasseur; Théodore Jamin ; à qui on donna pour suppléants : Pigeolet père, De Mainville, Edouard, Maturin, le receveur Fécher et Dieux (22 décembre).
Un des premiers actes des représentants provisoires de la ville de Nivelles fut d'adhérer à la protestation des villes de Bruxelles et de Mons, contre le décret de la convention, du 15 décembre, qui abolissait toutes nos anciennes institutions pour organiser notre pays d'une manière démocratique (31 décembre 1792) ; le 12 février suivant, ils refusèrent encore de publier ce décret, comme contraire à la souveraineté du peuple ; seuls, les citoyens Rascar, Dubois et Col émirent une opinion contraire et protestèrent contre la décision de leurs collègues. Tous, comprenant la nécessité de réorganiser l'administration de la justice, instituèrent, le 18 janvier 1793, un tribunal provisoire, qu'ils composèrent d'un maire, Dubois ; de six échevins: Desbille, Lebon, Rascar, Deppe, Pigeolet et Jamin ; et d'un secrétaire ou greffier, Jalhai. Cette mesure n'eut pas l'approbation de la Société des amis de la liberté et de l'égalité, qui protesta contre elle, mais sans résultat.
Bientôt les Français s'aliénèrent tous les cœurs par leurs violences et leurs exactions. Les membres de la convention et nombre d'agents subalternes dissipèrent dans des dépenses de luxe et des malversations les ressources qui auraient pu nourrir les armées. Leur avidité les porta à s'approprier les richesses des églises, belle proie qui excitait leur convoitise. Le 8 février, en vertu d'un ordre émané de Moreton, se qualifiant de général en chef de la Belgique, et des commissaires du pouvoir exécutif Chassart et Chépy, le lieutenant-colonel François Bruyant se présenta pour inventorier la trésorerie du chapitre et la séquestrer. Cet officier avait été envoyé à Nivelles à la tête du 1er bataillon des volontaires de la Marne et remplissait dans cette ville les fonctions décommandant militaire. Il avait au préalable mis les troupes françaises sous les armes, investi l'église et l'abbatialité avec 50 hommes, placé deux canons au grand portail et posé des sentinelles à chaque issue. Assisté de membres de la municipalité faisant fonctions de témoins, il fit sortir de l'église ceux qui y entendaient la messe, et somma le chanoine Lacroix, maître de la fabrique, de lui indiquer ce qui se trouvait sur les autels, dans la sacristie, dans l'endroit où se déposaient en temps de guerre les objets d'argenterie, et notamment la châsse, qui avait été cachée du 31 mai 1792 au 4 février 1793, sauf qu'on l'avait montrée du 26 septembre au 8 octobre à l'occasion de la kermesse. Une invitation de remettre à Charlé, nommé économe des biens du chapitre, leurs comptes et autres papiers, fut successivement adressée à tous les comptables de ce corps : le receveur de la fabrique, celui de l'argenterie, celui des bois, celui des pastes, celui des courseries, celui du spier ou épier.
Pendant la nuit du 6 au 7 mars, quelques bourgeois, craignant qu'il ne prit fantaisie aux conquérants étrangers de s'approprier la châsse, enfoncèrent la voûte de la trésorerie et les armoires qui s'y trouvaient, emportèrent les argenteries, enlevèrent aussi la châsse, avec le cercueil de Sainte-Gertrude, et cachèrent le tout en terre.
On peut juger du dépit qui s'empara des spoliateurs frustrés dans leurs projets. Le 11, en faisant des recherches dans l'église, ils enfoncèrent un tabernacle sur l'autel de Sainte-Gertrude et emportèrent un ciboire et le cercle d'une grande remontrance ; le lendemain on trouva au fond du tabernacle trois petites hosties et une grande, et le commissaire français convint d'en avoir brûlé.
Charles, peu désireux de rester chargé de la garde de tant d'objets de prix, obtint du chapitre, le 22, que ce corps reprendrait les argenteries de la collégiale, et s'en porterait caution, « en bon père de famille » et sans inventaire.
Le jour des Rameaux, à cinq heures après midi, les Français partirent, chargés de malédictions. Le 25 mars, les administrateurs provisoires, abandonnés à eux-mêmes, organisèrent des patrouilles de nuit, formées de bourgeois armés, et le surlendemain, ils convoquèrent l'ancien magistrat pour lui remettre les pouvoirs dont ils avaient été investis ; mais ils ne purent accomplir cette formalité, les échevins ne s'étant pas rendus à leur appel. Le 3 avril, deux de ceux-ci, Roulez et Delporte, partirent pour aller à Bruxelles complimenter le comte de Metternich, ministre de la cour d'Autriche. Le 7, la ville fut illuminée. Le clergé surtout fit éclater son contentement. Le chapitre ordonna, pour le 4 avril, une exposition du Saint-Sacrement et, pour le 5, une procession solennelle, en expiation des profanations qui avaient été commises le 11 mars. Le 1er avril, au soir, eut lieu dans le chapitre la remise de tout ce qui avait été soustrait à l'ennemi ; et comme le cercueil de la sainte avait considérablement souffert, on en fit un nouveau, où les reliques furent placées le 25 septembre.
Prévoyant que leur suppression complète serait la conséquence inévitable d'un nouveau triomphe des Français, les corporations religieuses mirent une grande ardeur à aider le gouvernement autrichien à soutenir la lutte contre la république. Le chapitre de Nivelles, sur l'invitation de l'évêque de Namur, vota, le 16 novembre 1793, un don patriotique de 50,000 florins, sur lesquels il paya immédiatement 19,357 florins, et, en mars suivant, 20,643 florins. Le 4 décembre, il fit encore un don de 12 lits, pour les soldats malades ou blessés Parmi les troupes alliées qui séjournèrent à Nivelles à cette époque se trouvèrent des émigrés français, et en particulier, la légion de Bourbon, dont la conduite dans les lieux publics suscita les plaintes les plus vives (mars 1794). L'empereur François II, qui s'était rendu aux Pays-Bas pour diriger les opérations militaires et avait fait à Bruxelles une entrée solennelle, arriva à Nivelles le 1er juin 1791. Après avoir passé la nuit à l'hôtel abbatial, il partit pour les Quatre-Bras, accompagné d'une escorte d'honneur, qui se composait de cavaliers volontaires, de Nivelles. On conserve encore, au secrétariat de la ville, une très belle clef, dorée au feu, qui fut alors présentée à l'empereur. Le 13, le prince d'Orange et le général Alvinzi, à la tête d'un corps d'armée autrichien, campèrent aux portes de la ville, depuis le Happart jusqu'à la chapelle de Notre-Dame des Sept Douleurs.
Après la bataille de Fleurus, l'armée française de Sambre-et-Meuse marcha vers Nivelles. Un détachement d'avant-garde occupa un moment cette ville le 5 juillet 1794. Les républicains y entrèrent définitivement le 6. La ville était dans la consternation: l'abbesse et la majeure partie du chapitre et de la noblesse avaient émigré. Ce qui restait de la population fut accablé de réquisitions payées en assignats. Le magistrat, suspect d'incivisme, fut cassé, et ses membres, le maire de Wauthy, les avocats Berlaimont, Lemaire, Marbais ; les notaires Troye, Roulez et Froment, et Fécher fils, secrétaire du chapitre, furent arrêtés et conduits à Charleroi (22 messidor an II), où ils restèrent cinq jours, après quoi on les ramena à Nivelles, où ou leur donna la ville pour prison, à la demande et sous la responsabilité de la nouvelle municipalité. Celle-ci, qui avait été élue le 11 juillet (ou 23 messidor), se composait des citoyens Leclercq, Stocq, Picret, avocat ; Lebon, Narez, Paradis, Bomal, Lons, Bette, Mercier, Theys, Pigeolet, Daras, Robert, Delbruyère, Clans, Bande, Hauchamps, Brackman et Savary. Elle se partagea en deux sections, qui devaient être alternativement de service de jour à autre, et qui eurent pour président : la première, Mercier ; la seconde, Leclercq. La municipalité, dont Narez fut nommé secrétaire, se fit graver, le 15 août, un nouveau sceau, orné d'emblèmes et de devises analogues aux circonstances ; le 5e jour complémentaire, elle adopta pour lieu de réunion l'hôtel abbatial, et devant la collégiale on planta en grande pompe un arbre de la liberté.
Les envahisseurs, bien décidés à traiter cette fois la Belgique en pays conquis, imposèrent aux ecclésiastiques, nobles et riches propriétaires du Brabant wallon une contribution militaire de trois millions de livres (arrêté des représentants Haussman et Briez, en date du 23 vendémiaire an III). Le 17 nivôse suivant, les représentants du peuple près les armées du Nord et de Sambre-et-Meuse déclarèrent aux riches habitants et propriétaires de la ville de Nivelles et de son arrondissement, qu'ils étaient tous personnellement ou solidairement responsables du payement de la contribution en numéraire.
« En conséquence, ils feront, ajoute cet acte, sous l'autorité des magistrats, toutes les avances qui pourraient devenir nécessaires. La contribution devra être entièrement soldée au 20 du mois prochain (c'est-à-dire au 20 pluviôse): faute de payement, elle augmentera de 25,000 livres par jour de retard, et il sera pris chaque jour quatre otages, à compter du 21 du mois prochain. Le magistrat de Nivelles enverra aux représentants du peuple à Bruxelles l'état de répartition ; il le fera imprimer et afficher dans la ville et les communes de son ressort, ainsi que le présent arrêté».
(Signé) Haussman, Boberjot, Gillez, Dolengle, Roger-Ducos, Joubert, Briez.
Les listes des nobles imposés sont curieuses à consulter. Le duc d'Arenberg y est taxé à 200,000 livres, le duc de Looz à 100,000, la citoyenne de Marsan à 80,000, le baron de Roose à 40,000, le seigneur de Faulquez, Morbecq, sire de Rêves; le comte de Lannoy, à 30,000 livres chacun ; le comte de Seneffe à 25,000, les douairières de Trazegnies, de Haultepenne, de Lalaing, de Celles, le marquis de Gavre, le baron de Gentinnes, la comtesse de Falais à 20,000 livres chacun. Quelques noms : Marsan, Morbecq, Gentinnes, sont biffés, parce qu'on avait mis sous séquestre les biens de ces familles, qui avaient émigré. Le clergé fut encore plus lourdement frappé. On imposa le chapitre de Sainte-Gertrude à 140,000 livres, l'abbesse à 12,000, le prévôt à 8,000, le doyen à 2,000, le chapitre de Saint-Paul à 1,200, les chapelains à 2,000, les quotidianes à 2,000, la fabrique de la collégiale à 1,000, l'abbaye de Gembloux à 120,000, celle d'Afflighem (pour ses biens situés dans le Brabant wallon) à 190,000 livres, le prieuré de Basse-Wavre à 8,000, Villers à 275,000, Aywières à 160,000. Nizelles à 12,000. Oignies à 16,000, Wauthier-Braine à 12,000, la Ramée à 60,000, Heylissem à 80,000, la commanderie de Vaillampont à 30,000, celle de Chantraine à 25,000, l'hôpital de Rebecq à 8,000, les prieurés de Renisart, de Saint-Nicolas au Bois, de Gistoux (sur Chaumont), d'Herlaymont, de Heigne, de Sart-les-Moines, à 6,000 chacun, Bois-Seigneur-Isaac à 12,000, le couvent de Lens-Saint-Remi à 7,000, l'abbaye de Bellinghen à 2,000, le couvent de Lérine à 6,000, etc. Nous omettons nombre d'autres établissements ou fondations, les uns à cause de ce qu'ils avaient leur siège hors du Brabant wallon, les autres à cause de leur peu d'importance. Le chapitre de Nivelles dut encore payer 1,951 florins 5 sous pour ses biens de Wichelen ; 4,336 fl. 5 s. pour ses biens d'Appelteren, 500 fl. pour ses biens de Saint-Antelincx, 17,622 fl. 5 sous (ou 32,000 livres) pour ses biens dans le comté de Namur, soit en tout 97,431 fl. 18 s. 10 2/3 deniers, ainsi qu'il résulte d'un compte arrêté le 20 septembre 1796.
Une nouvelle organisation fut donnée à la Belgique le 14 fructidor an III, par un arrêté du comité de salut public de la convention, que confirma la loi du 23 ventôse an V. Une partie du Brabant devint le département de la Dyle, dont le 21e canton se composa de Nivelles, et des villages de Thines, de Baulers, de Monstreux et de Bornival. Au fractionnement de la ville en paroisses on substitua une division en neuf sections, trois intérieures et six extérieures : la section de la Rivière, de la porte Sainte-Anne à la porte de Charleroi ; la section des Montagnes, de la porte de Charleroi à celle de Mons ; la section du Temple, de la porte de Mons à la porte Sainte-Anne ; les faubourgs Saint-Roch, des Moulins, des Fontaines, des Forêts, des Vergers et des Ardennes, respectivement situés hors et à droite des portes Sainte-Anne, de Bruxelles, de Namur, de Charleroi, de Mons et de Soignies. Actuellement, la banlieue comprend cinq sections : A, au N.-O. ; B, au N. ; C, à l'E. ; E, à l'O. et F, au S. Quant à la ville ou partie centrale, elle forme la section cadastrale D, qui est subdivisée administrativement en 3 sections :
- la 1e, limitée par la rue Sainte-Anne, la place Saint-Paul, le marché au Bétail, la Grand-Place, la rue de Charleroi et les boulevards des Archers, de la Fleur de Lis, de l'Esplanade et de l'Hôpital général ;
- la 2e, limitée par la rue de Charleroi, la Grand-Place, la rue de Mons et le boulevard de la Dodaine ;
- la 3e, limitée par la rue de Mons, la Grand-Place, le marché au Bétail, la place Saint-Paul, la rue Sainte-Anne et les boulevards des Arbalétriers et de la Batterie.
Le 22 frimaire an IV, un arrêté des représentants du peuple plaça à Nivelles le siège d'un des tribunaux de police correctionnelle du département, et lui subordonna les cantons de Nivelles, de Tubise, de Hérinnes, de Braine-l'Alleu, de Genappe et de Melery. Le 27 du même mois, la circonscription du canton de Nivelles fut réduite à la ville seule.
La cherté des subsistances provoqua à cette époque une nouvelle émeute, qui paraît avoir eu pour but unique d'amener un changement dans le personnel de la municipalité. Des pétitions qui furent tumultueusement colportées en ville les 15 et 30 messidor an III, demandèrent la destitution de ce corps, que l'on accusait d'être partisan de l'Autriche, et la fixation du prix de la rasière de grain à 3 florins pour le froment, à 5 escalins pour le seigle. Une nouvelle demande du même genre fut adressée aux représentants du peuple, le 16 thermidor an III, elle était signée par la citoyenne Friscart, se disant « constituée par le peuple », et dont le mari était portier de la porte de Mons. On répandit en outre des proclamations appelant le peuple à écraser sous l'arbre de la liberté ceux qui s'opposeraient à ses justes demandes et l'invitant à s'assembler au son du tocsin pour proclamer une nouvelle municipalité. Celle qui était en fonctions, appuyée par le commandant de place Labat et l'agent national Faignard, réprima les désordres: elle appela aux armes les serments (le 22 thermidor), destitua Friscart (le lendemain), et reçut de Bruxelles, d'où l'autorité supérieure avait déjà envoyé un ordre de disperser les émeutiers, un ordre émané du tribunal criminel et daté du 28 fructidor, prescrivant l'arrestation du notaire Carlier, de Friscart et de sa femme, de Jean Voituron, de Voituron père, de N. Genêt, déserteur autrichien ; de Dubois l'aîné, de Louis Campion l'aîné, de la femme Jacquet, des domestiques du notaire Rascart, de l'ouvrier Doest et de la femme Régal, qui étaient signalés « comme des intrigants et des turbulents, se parant a tort du titre de patriotes ».
L'arrestation des prévenus s'accomplit le 2 vendémiaire an IV, pendant la nuit ; mais, cinq jours après, ils furent renvoyés de Bruxelles, comme non coupables. De plus, quoique le conseil général de la commune eût approuvé la conduite de la municipalité, celle-ci fut remplacée, le 26 frimaire, par une autre magistrature, composée des citoyens Lons, maire ; du notaire Rascart, du médecin Desbille, du chirurgien Clément, de Campion, marchand, et de Lefebvre, commissaire du pouvoir exécutif. C’était le triomphe complet du parti qui venait de soulever la population, et déjà Friscart était redevenu l'un des serviteurs de la ville. La nouvelle assemblée eut à lutter contre des difficultés analogues à celles qu'avait rencontrées la précédente. Le 10 frimaire, il y avait encore eu des troubles, parce que le marché aux grains était, pour ainsi dire, abandonné ; le peuple désespéré s'attroupa et enleva le peu de blé qu'avaient apporté les paysans. Le mal allant en empirant, on se vit enfin forcé, le 22 brumaire, de commander à douze citoyens, membres des anciens serments, de se trouver en armes au marché, en attendant l'arrivée des troupes. Le même hiver fut marqué par les exploits du bruxellois Jacquemin, qui, sous le nom bizarre de Cousin Charles de Loupoigne, souleva les paysans du voisinage. A Nivelles on parvint à maintenir l'ordre, mais, au préalable, on y désarma les habitants (2 ventôse).
Les tendances de l'administration municipale, composée de partisans du nouveau régime, se révèlent dans une correspondance qu'elle engagea avec l'abbesse, qui était revenue de l'émigration. Cette dame continuant à s'entourer à l'église de serviteurs couverts de livrées, reçut la lettre suivante, qui est datée du 7 prairial an IV.
« Citoyenne, Il nous est rapporté dans ce moment qu'au mépris de la loi vous souffrez que les officiers attachés à votre chapitre se disposent à vous accompagner à la procession que vous allez faire dans l'enceinte de votre église, revêtus des signes féodaux ou seigneuriaux. Nous voulons bien vous prévenir que si vous ne les faites retirer d'abord avec leurs coustumes et livrées anciennes, que nous serons obligés, malgré nous, d'employer à votre égard ainsi qu'à leur charge, les rigueurs de la loy.
Salut et fraternité ».
La direction des hôpitaux et autres établissements de charité envenima encore des rapports qui étaient déjà peu agréables. Le 30 ventôse an IV, l'administration municipale enjoignit aux économes des maisons de bienfaisance de lui remettre la liste des personnes qu'ils avaient secourues, et de ne plus accorder de secours sans leur approbation. Bientôt, se basant sur un arrêté des représentants du peuple, du 1er germinal an III, qui avait remis aux municipalités la surveillance des établissements de bienfaisance, et se plaignant des abus qui s'y étaient introduits, à Nivelles la municipalité proclama la nécessité de substituer à des membres du chapitre des pères de famille, nomma De Villers père, économe de l'hôpital Saint-Nicolas, Dupont, directeur du Sépulcre, et Daras, directeur des Orphelins, et invita les économes en fonctions à rendre leurs comptes dans les quinze jours (25 messidor an IV). L'abbesse, ayant réclamé, reçut cette missive plus que cavalière, datée du 28 du même mois :
« A la citoyenne Vandernoot se disant indûment abbesse de Nivelles.
Pour toute réponse à une lettre qui nous a été remise et signée d'individus que nous ne reconnaissons plus en la qualité qu'ils prennent et signée entre autres par la citoyenne Vandernoot, se disant indûment abbesse de Nivelles, nous enjoignons par cette, conformément à notre arrêté du 25 messidor, à tous chanoine et chanoinesse de ne plus s'immiscer dans la gestion des hôpitaux et maisons de bienfaisance, ni même de s'y présenter. Nous sommes las de cette lutte que vous voulez établir avec nous de corps à corps, vous qui n'avez aucun caractère public. Nous déclarons que si, dans quinze jours, la reddition de vos comptes n'est pas effectuée, c'est devant les tribunaux que vous serez traduite pour y rendre compte, c'est là que vous prouverez l'emploi du patrimoine des pauvres que vous appelez votre propriété. C'est là que la vérité sera découverte.
Point de subterfuge, réponse catégorique».
L’'abbesse réclama vainement auprès de l'administration générale du département, en alléguant qu'elle n'avait ni comptes, ni papiers (1er thermidor an IV) ; la commune persista à la tracasser. Le 17 thermidor de la même année, mais en y mettant un peu plus de formes, elle l'invita à renoncer à la direction des béguinages. Bientôt l'heure du chapitre sonna à son tour. Il essaya de la retarder, en profitant de la réaction royaliste et catholique qui se manifesta dans la république française en l'an V. L'inspecteur de l'enregistrement et du domaine national du département l'ayant compris au nombre des établissements religieux supprimés, l'abbesse et quelques chanoinesses, d'abord (le 9 brumaire an V), puis le prévôt, le doyen et le chapitre (le 24), protestèrent en alléguant la nature séculière de leur corps. L'administration centrale déclara que la loi avait maintenu les communautés séculières (4 prairial an V) ; déjà antérieurement elle avait autorisé le chapitre à percevoir directement la moitié du produit des ventes d'arbres effectuées dans les bois qu'il possédait par indivis avec le domaine (4 ventôse an V). Cette situation dura peu. Le coup d'Etat de fructidor rendit le pouvoir et l'énergie aux républicains qui destituèrent sans pitié des administrations dont les tendances étaient hostiles à leurs principes. La loi du 5 frimaire an VI, qui détruisait dans les départements réunis tous les chapitres séculiers, bénéfices simples, séminaires et corps laïques des deux sexes, fut signifiée le 15 janvier 1798 au chapitre de Nivelles, dont la dernière supérieure ne survécut guère à cette décision. Elle mourut le 13 octobre de l'année suivante, à l'hôtel abbatial, et fut ensevelie, sans cérémonie, non pas dans l'auguste collégiale où reposaient les dames qui l'avaient précédée, mais au cimetière commun, où rien ne rappelle plus son souvenir.
La suppression des corps de métiers, la réduction du nombre des notaires, la fermeture des couvents, mesures qui signalèrent l’'an V (1796-1797), avaient multiplié à Nivelles le nombre des ennemis du nouveau régime. Les simulacres d'assemblées primaires, qui se tinrent en l'an V, en l'an VI, en l'an VII, dans l'église Saint-Paul, devenue le temple de la loi, et sous le nom emphatique d'Assemblée primaire de l'humanité, n'eurent aucune importance. Le clergé et les religieux de Nivelles animaient les esprits contre les nouvelles institutions, ce qui leur attira, comme au reste du clergé belge, une sentence de déportation en masse (loi du 49 fructidor an V). Quelques ecclésiastiques ou religieux réussirent à se sauver, en se tenant cachés pendant près de trois ans ; mais, les 13 et 15 novembre 1798, on arrêta le chanoine Pierre Alardin, les curés Charles-Jacques Malcorps de l'église de Notre-Dame, André-Joseph Laforette de l'église des saints Jean et Nicolas, Ferdinand-Joseph Hanicq, de Saint-Jacques, des chapelains, des récollets, des carmes, qui tous furent envoyés vers l'Ile de Ré. Alardin n'acheva pas ce voyage et mourut à Saint-Maur en Touraine, le 4 janvier 1799.
De cette époque datent nombre d’autres mesures révolutionnaires. Le peuple montrant un esprit très hostile aux soldats, et particulièrement aux gendarmes, défense fut faite de les insulter (19 brumaire an V). La collégiale, le seul édifice qu'on avait laissé au culte le 12 vendémiaire an VI, fut également fermée le 15 pluviôse suivant et remplacée par les églises de Notre-Dame et de Saint-Nicolas, dont la première fut abattue quelques années après et la seconde conservée, lorsqu'on rouvrit le temple dédié à Sainte Gertrude. Le 21 germinal an VII, on débaptisa les rues qui portaient une dénomination peu en concordance avec le nouveau régime.
On appela :
La rue de Charleroy, rue de Libre sur Sambre.
La rue Sainte-Anne, rue de Halle.
La rue des Béguines, rue de la Concorde.
La rue des Cornaux, rue de la Malice.
La rue André, Rue de l'Egalité.
La rue Gertrude Rue de la Bienfaisance.
La rue de la Religion, rue du Repentir.
La rue Saint-Jean l'Evangéliste, rue du Contrat Social.
La rue George, rue de la Loi.
La rue de l'Evêché, rue de la Révolution.
La rue des Conceptionistes, rue de la Suppression.
La rue de la Magdelaine, rue de la Réunion.
La rue d'Afflighem, rue du Géant.
La rue Bléval, rue de la Jeunesse.
La Petite rue de l'Evêché, rue de la Tranquillité.
La rue des Juifs, rue de la Fraternité.
La rue Maurice, rue de la Victoire.
Ces dénominations ne subsistèrent que six ans: elles furent supprimées par un autre arrêté de l'administration municipale, daté du 8 germinal an XIII.
Les temps qui suivirent rendirent le calme au pays. L'époque du consulat et celle de l'empire s'écoulèrent sans incident remarquable. La loi du 28 pluviôse an VIII partagea le département de la Dyle en trois arrondissements communaux ; Nivelles devint le chef-lieu du troisième, dans lequel la nouvelle organisation rangea les cantons de Nivelles, Braine, Genappe, Hérinnes, Jauche, Jodoigne, Melery, Nil-Saint-Martin, Perwez, Tubise et Wavre. Une nouvelle division du département en arrondissements et justices de paix, en date du 19 nivôse an X, plaça dans l'arrondissement de Nivelles les cantons de justice de paix de Genappe, Hérinnes, Jodoigne, Nivelles (au nombre de deux), Perwez et Wavre.
Le premier arrondissement de justice de paix de Nivelles eut dans son ressort la 3*' section interne de la ville, les 1e, 5e et 6e sections externes, Bornival, Braine-le-Château, Clabecq, Ittre, Monstreux, Oiskerque, Samme, Tubise et Virginal ; le second arrondissement : les 1e et 2e sections internes et les 2e, 3e et 4e sections externes de la ville, Baulers, Bois-lsaac, Braine-l'Alleu, Haut-Ittre, Lillois, Ophain, Plancenoit, Thines, Waterloo, Wauthier-Braine et Witterzée. Cette division a subsisté jusqu'à présent, sauf les modifications suivantes : le 30 décembre 1822, la justice de paix de Hérinnes a été supprimée, et une partie de son territoire (Rebecq, Quenast, Rognon) réunie au 1er canton de Nivelles ; le même arrêté supprima également les cantons de La Hulpe et de Grez, pour les joindre en partie à l'arrondissement de Nivelles, dont les limites reçurent alors d'importantes modifications. Une loi du 24 mai 1848, réalisant ce qu'avaient déjà décrété la loi du 22 décembre 1828 et l'arrêté royal du 6 juillet 1830, a réuni le premier canton de Nivelles au second canton de cette ville, qui se compose actuellement de vingt communes : Nivelles, Thines, Baulers, Monstreux, Bornival, Virginal, Ittre, Haut-Ittre. Ophain, Lillois, Plancenoit, Waterloo, Braine-l'Alleu, Wauthier-Braine, Braine-le-Château, Clabecq, Tubise, Oiskerque, Quenast et Rebecq, comme nous l'avons dit dans le tableau qui précède notre seconde livraison.
En l'an XIII, Nivelles n'avait conservé de son ancienne importance que quelques institutions administratives, judiciaires et autres: une sous-préfecture, un tribunal de première instance, deux tribunaux de paix, une recette de l'enregistrement, des bureaux de l'enregistrement et conservations des hypothèques, une sous-inspection forestière, une recette principale des droits réunis, une cure primaire, une école secondaire, une lieutenance de gendarmerie, une poste aux chevaux, une foire annuelle, un marché au bétail. De l'empire datent les limites actuelles de la commune: un arrêté du 22 prairial an XII et un autre du 30 juillet 1817 les ont fixées du côté de Thines. Le 1er juin 1813, on arrêta le procès-verbal de délimitation, qui a été modifié, le 20 juillet 1832, pour les limites vers Obaix, Petit-Rœulx et Arquennes (province du Hainaut) ; l'arrêté du gouverneur du Brabant qui approuve ces modifications porte la date du 20 décembre 1831.
Le 29 janvier 1814, lors de l'entrée des alliés en Belgique, un détachement de cosaques entra dans Nivelles et y fut reçu avec de grandes démonstrations de joie. Le chef exigea le paiement immédiat d'une somme de 200 louis, dont une partie fut fournie par la caisse des hospices, ainsi que la délivrance immédiate des personnes emprisonnées et qui n'étaient pas accusées de crimes. Il fallut encore, avant leur départ, fournir des rations à ces prétendus cosaques qui n'étaient qu'un ramassis d'aventuriers, commandés par le garde-champêtre de Wagnelée. Quelques temps après, la fraude fut découverte et les poursuites dirigées par les autorités judiciaires aboutirent au remboursement de cette contribution de guerre d'un nouveau genre. En l'année 1815, Nivelles constitua une des places d'armes de l'aile gauche de l'armée de Wellington. Ce fut de là que ce corps, sous les ordres du prince d'Orange, se porta sur les Quatre-Bras. Pendant la bataille du 18, la ville resta abandonnée à elle-même et paisible. Le 19, les Anglais victorieux revinrent camper dans les campagnes voisines, vers Thines, et les Brunswickois s'établirent près de Lillois.
La ville eut longtemps pour maire M. Dangonau, qui marqua son administration par d'heureuses réformes: la démolition des remparts, devenus inutiles, la transformation des marais de la Dodaine en une belle promenade, la réunion des hôpitaux et des hospices dans un local unique, la création d'un refuge de vieilles femmes et d'une salle de maternité, l'établissement d'une académie de dessin, d'une école de musique, d'un mont-de-piété et d'une caisse d'épargnes, justifient les honneurs qu'on a récemment rendus à sa mémoire.
La révolution de 1830 le surprit à l'apogée de sa popularité. Fonctionnaire du roi Guillaume, il lui resta attaché, tandis que l'opinion se prononçait de plus en plus dans le sens opposé. Pendant la nuit du 23 au 24 septembre, à l'annonce des combats de Bruxelles, des habitants de Nivelles demandèrent des armes pour se porter au secours de cette ville. La régence réunit la garde bourgeoise ; mais, à la suite de deux engagements de peu d'importance, cette dernière abandonna l'hôtel-de-ville, en se retirant par le cloître et par l'église, où M. Dangonau se tint caché pendant quelques jours. Des excès regrettables furent commis. On poursuivit le chevalier de Cléty, dont on livra la maison au pillage. Les patriotes, victorieux, remplacèrent la régence par une commission de sûreté, tandis qu'un grand nombre de volontaires partaient pour la capitale, où ils se conduisirent vaillamment. Dans leurs rangs figuraient deux femmes, dont l'une se distingua en allant planter le drapeau brabançon au milieu du parc, sans craindre la grêle de balles qui pleuvait autour d'elle. Trente ans de paix et de prospérité se sont écoulés depuis ces événements mémorables, trente ans de calme profond. Si la population de Nivelles ne s'est pas considérablement développée, la ville s'est enrichie d'établissements utiles: sa double école normale, l'agrandissement et l'accroissement de ses institutions de charité, sa station du chemin de Manage à Wavre, ses vastes ateliers de matériel de chemin de fer l'ont embellie. Le désastre qui a frappé sa vieille collégiale ne sera peut-être pas fâcheux sous tous les rapports: il aura amené plus promptement une restauration complète du beau monument qui a été le berceau de la cité.
La ville de Nivelles est le chef-lieu d'un arrondissement administratif, qui est le troisième de la province du Brabant, et se divise en dix cantons de milice: Braine-l'Alleu, Genappe, Hamme, Ittre, Jauchelette, Jodoigne, La Hulpe, Nivelles, Perwez et Wavre. Le canton de Nivelles, depuis l'arrêté organique du 10 février 1817, n'a comprise et ne comprend que la ville du même nom. Cette dernière est le centre d'un arrondissement des ponts et chaussées ; d'une perception des postes ; du septième district de voirie vicinale ; du douzième district agricole, qui compte quatre médecins vétérinaires du gouvernement, et qui, réuni au treizième district ou district de Genappe, a un comice agricole organisé ; et du sixième ressort d'inspection des écoles primaires publiques. Elle appartient au huitième arrondissement de la deuxième direction des mines. Elle possède deux écoles normales, un collège communal, un comptoir d'escompte de la banque nationale. Elle est la résidence d'un agent du trésor ; d'un contrôleur des contributions, dont la surveillance s'étend sur les recettes de Chastre, Genappe, Nivelles et Marbais ; d'un receveur des contributions, dont le ressort comprend Baulers, Bornival, Monstreux, Nivelles, Thines, Houtain-sur-Dyle ; d'un vérificateur de l'enregistrement, d'un receveur de l'enregistrement, ayant pour ressort le canton judiciaire de Nivelles ; d'un conservateur des hypothèques ; d'un vérificateur des poids et mesures ; d'un géomètre du cadastre, ayant pour ressort les cantons judiciaires de Nivelles et de Genappe, sauf Quenast, Rebecq, Maransart et Bousval.
Sous le rapport judiciaire, Nivelles est le siège d'un tribunal de première instance, qui a la même circonscription que l'arrondissement, et dont la juridiction s'étend actuellement sur cinq cantons de justices de paix: Genappe, Jodoigne, Nivelles, Perwez et Wavre. Des arrêtés royaux du 22 décembre 1832 et du 8 avril 1833 ont fixé:
Le premier le nombre des avoués instrumentant près de ce tribunal à huit ;
Le second, le nombre des huissiers instrumentant dans l'arrondissement à quatorze.
Le canton de Nivelles compte onze notaires, dont cinq résident au chef-lieu. Nivelles a une chambre de commerce ; il s'y trouve aussi une maison d'arrêt et une caserne de gendarmerie. Le grand nombre d'établissements publics et de fonctionnaires que l'on trouve à Nivelles contribue à conserver à cette ancienne ville le rang qu'elle a toujours occupé et justifie son titre de chef-lieu d'arrondissement. Il est permis d'espérer que l'impulsion favorable, qui y a été récemment imprimée à l'activité industrielle, ouvrira à la population do nouvelles sources de prospérité et rappellera les beaux jours de la splendeur de Nivelles, aux XIVe et XVe siècles.
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